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108               LA FONTAINE DE SAINT-MAÃEUL,
 palais du prélat, monte sur l'un de ses chevaux, part au galop
pour Ternay. Il aperçoit bientôt son clocher; il suivait les bords
 planes du Rhône, où existait encore l'ancienne route établie do
 Vienne à Lyon par les Romains, avant que le plus déplorable des
tracésl'eût conduite par monts et par vaux à St-Symphorien-d'Ozon.
En approchant de la fontaine, il voit une jeune femme d'une beauté
 parfaite, qui faisait boire de cette eau à l'enfapt qu'elle tenait entre
ses bras. — De l'eau de Saint-Maïeul pour ma mère qui se meurt !
cria-t-il sans descendre de cheval. La jeune femme plonge sa coupe
dans le bassin de la fontaine, et la verse dans son flacon en lui
disant : —Puisse cette onde sainte rendre ta mère à ton amour! —
Merci! merci! dit Bérilon.—Il repart chargé du précieux flacon,
presse les flancs de son coursier et rentre à Vienne. En sera-t-il
encore temps? Les fantômes du délire assiègent la couche de sa
 mère; une sueur glacée ruisselle sur son front où la mort jette
ses ombres; le dernier verset de la prière des agonisants vient
d'être répété par les vierges agenouillées. — Arrivez ! arrivez ! dit
Magdeleine à la vuo de Bérilon, ou il faudra que l'eau de Saint-
Maïeul ressuscite un cadavre. — Il soulève la tête de la mourante,
entr'ouvre sa bouche et lui fait avaler quelques gouttes d'eau.
Il se prosterne ensuite aux pieds du lit pour attendre, avec l'as-
surance de la foi et les angoisses de la nature, l'effet du liquide
tout-puissant. O bonheur! le prodige s'opère, le combat de la
vie et de la mort cesse; la malade, paraissant sortir d'un sommeil
agité, reprend ses sens, appelle et reconnaît son fils; l'agonie a
été changée en une crise salutaire.
    La convalescence de la mère de Bérilon commençait à peine, qu'il
retourna à Ternay porter ses prières et ses offrandes à l'autel de
StMaieul. Il demanda la demeure de la jeune femme qui lui avait
donné l'eau libératrice, il voulait lui exprimer aussi les témoi-
gnages de sa reconnaissance ; mais personne ne la connaissait, et
ne l'avait même vue le jour qu'elle était venue à Ternay. Il lui
fut impossible de découvrir ses traces. Alors son imagination ex-
altée par la guérison surnaturelle qu'il avait obtenue, vit dans
cette femme la Reine des Mères, Marie, qui aurait abandonné un
instant les deux pour devenir l'instrument glorieux d'un miracle.