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5'>                       DES PASSIONS

       Seigneur! préservez-moi, préservez ceux que jV.:me,
       Frères, parents, amis et mes ennemis même
              Dans le mal triomphants,
       De jamais voir, Seigneur! l'été sansfleursvc:\T.8iiies,
       La cage sans oiseaux, la ruche sans abeilles,
              La maison sans enfants.

   Ces vers me causent aussi un attendrissement singulier, et
c'est tout ce que je demande à la tragédie, ne voulant pas
être plus exigeant que Racine. On a coutume d'attribuer au
christianisme seul ce retour aux vrais sentiments de l'homme,
je crois qu'on s'est un peu égaré ici sur les pas de M. de
Châteaubriant. Cet illustre écrivain, en glorifiant le christia-
nisme des progrès accomplis depuis dix-huit siècles, a oublié
la part d'une autre puissance, divine aussi, qui marchait à
côté de la première : le temps. C'est pourquoi notre litté-
rature n'est pas seulement fille du christianisme, mais aussi
du XVIIIe siècle, et, dans le XVIIIe siècle, de Rousseau et de
la révolution. Rousseau ne semble pas plaire à M. Si-Marc
Girardin. Je le plains (Rousseau). M. Girardin dit que ses ré-
cits d'amour sont à la fois exaltés et brutaux. S'il nous était
permis, à nous chétifs, de changer un peu les paroles de l'in-
génieux professeur, nous dirions qu'ils sont à la fois sublimes
et passionnés, et que c'est ià le véritable amour, tout l'homme,
dieu et démon tour-à-tour.
   Mais, à Dieu ne plaise, que je m'aille jeter dans un excès
contraire, en disant que dans cette voie qui restituait à l'art
l'homme tout entier, nul n'a chancelé, nul n'a exagéré les
principes: je suis si loin de le penser que je crois tout le con-
traire. Mais le système en lui-même est-il un progrès ou une
chute, une vérité ou une erreur? voilà une discussion que
l'on aurait voulu trouver dans un livre consacré aux passions