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3'î SÉJOUR DE J . - J . HOUSSEAU sophe, mais on ne songea pas à le plaindre : il les a décrites lui- même en style très animé, dans plusieurs passages de ses li- vres. Arrivé à une extrême vieillesse, le docteur Mônier, l'un des héros de l'épopée, se plaisait à raconter leur voyage; ses impressions étaient alors bien différentes de celles expri- mées par son compagnon. A peine remis de ses ennuis et de ses fatigues, Roussseau fit une chute violente, se blessa gravement le poignet de la main droite; à la fin d'octobre, il était à peine guéri, qu'il devint garde-malade : Thérèse Levasseur se mit au lit pour une affection sérieuse, un rhumatisme généra). Dès lors, les visites du docteur Ménier recommencèrent plus assidues; une correspondance sinon intime, du moins suivie, s'établit enlre Jean-Jacques et lui. Des lettres fort intéressantes, entièrement inédites, inconnues, sont entre les mains de son fils, qui, de chirurgien militaire, employé dans l'armée d'Afrique, s'est fait industriel et habite Paris. L'hiver, au mois de décembre 1769, apparut avec toutes ses rigueurs : la glace, la neige rendirent les communications très difficiles, les chemins presqu'impraticables; Rousseau à Montquin, éloigné de tout secours, de toute société, cloîtré dans une chambre di-posée pour la belle saison et où il était impossible de se préserver du froid, où, suivant ses propres paroles, il gelait auprès d'un grand feu en se rôtissant, son- gea par force à chercher une autre demeure. « Je ne veux pas m'èloigner de ce pays, marque-t-il à M. Moulton, en janvier 1770, sans vous en donner avis : la campagne ici n'est plus tenable, il y fait presqu'aussi froid que dans ma chambre; l'onglée, quand je veux écrire, me fait tomber la plume des doigts. » Mais les préparatifs de ce départ durèrent toute la mauvaise saison qui fut rude pour lui. Les plaintes, la maladie de sa femme, ses souffrances personnelles, l'isole- ment absolu, les privations de toute espèce, l'indécision de son