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NOTES SUR LE SALON 219 forme moderne des tuiles dont il a couvert certain petit édicule de son tableau : il paraît avoir copié le tout dans une auberge rustique du Lyonnais, plutôt que dans la Judée, au premier siècle. Mais pour justifier le ton général de sa composition, d'un jaune roux tirant sur le blanc, il faudrait que du ciel d'Orient qu'il a évoqué arrivât cette lumière aveuglante qui lave de blanc tous les tons clairs des objets qu'elle inonde, et produit ces ombres chaudes, vio- lettes ou bleues, inconnues à nos climats. Or, ces ombres violettes manquent d'intensité, là où le peintre les a indi- quées. Pour être d'accord avec des ombres plus fortes, il faudrait que son ciel eût reçu de sa palette une coloration plus intense. Le bleu en est trop pâle, pour justifier la tonalité claire de son tableau. Malgré ces critiques, cette œuvre a trop de qualités pour ne pas rester digne d'éloges. D'une scène biblique, à une scène de mœurs contempo- raines, la distance est grande et la transition difficile. La trouverai-je dans le sujet presque héroï-comique de la com- position fantastique de M. Surand : Saint Georges et le monstre? Déjà exposée à Paris en 1889, cette page étonnante nous transporte en plein dans le monde des enchanteurs et des féeries. A gauche, au devant d'un antre de rochers, un colossal dragon vert et bleu, moitié oiseau, moitié serpent, d'un aspect horrible et repoussant, broie entre ses griffes puissantes un couple humain, qui se débat dans ces mor- telles étreintes. Plus bas, séparé de la bauge du dragon par un ravin, armé de toutes pièces, la lance en arrêt, monté sur un cheval qui renâcle de terreur, le chevalier saint Georges « pousse au monstre », et à la façon hardie et assurée dont il tient son arme, on comprend que l'issue de la lutte contre l'horrible bête ne peut être douteuse. Restons sur cette légitime espérance, en souhaitant que les qualités