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	                             PÉLOPONÈSE.                             495
se contractent sous le coup d'une douleur aiguë ; il cherche des
yeux et reconnaît bientôt les corps de safemmeetde ses trois fils.
 Il s'approche, s'agenouille successivement auprès de chacun
d'eux , et leur fait de longs adieux à voix basse. Réunissant
ensuite les débris de sa cabane incendiée , il élève sur les quatre
cadavres quatre monuments funèbres. Puis , se retournant vers
le soleil qui plongeait dans un sanglant horizon, il pose la main
gauche sur son cœur, et, levant l'autre vers le ciel, il prononce,
d'une voix lente et forte, le serment de revenir une fois encore
dans ces lieux où rien ne le rappellerait désormais , lorsqu'il
aurait coupé assez de têtes d'infidèles pour en remplir les quatre
monuments dont il venait de recouvrir les corps mutilés des êtres
qu'il aimait. Un tel vœu, formé par un tel homme , était pour
les Mulsumans le signal de nouveaux et terribles malheurs.
   À partir de ce moment, il n'y eut plus pour eux un instant de
sécurité, Jean Stathas fondait tout à coup sur eux, le jour pen-
dant leurs festins, la nuit pendant leur sommeil. Il ne combattait
plus, il massacrait ; son courage s'était changé en férocité. Un
soir, il sortait d'Argos, où il venait de conduire un petit nombre
de palikares qui avaient pris part, sous ses ordres, à de récents
exploits ; en reprenant seul le chemin des montagnes, il passe
auprès d'uue habitation musulmane dans l'intérieur de laquelle
des chants se faisaient entendre ; ses habitants se livraient tran-
quillement à une fête de famille. Cette proie ne devait pas lui
échapper ; il entre, égorge trois hommes qui fumaient sur les
divans ; une femme, sur le sein de laquelle jouait un petit en-
fant, n'échappe point à son aveugle fureur. Ivre de sang, il allait
frapper l'enfant lui-même, lorsque cette frêle créature se jette ,
pleine d'effroi, entre les bras du meurtrier de sa mère , et s'at-
tache à ses vêtements. Les cris de cet enfant l'émeuvent ; il s'ar-
 rête , il le regarde ; il semble douter de ce qu'il va faire ; enfin , il
le saisit et s'enfuit en courant. Une métamorphose subite venait
de se faire en lui ; la clémence était rentrée dans son âme ; il
 se crut assez vengé.
    Un petit monastère , dont on voit encore les ruines , s'élevait
 près de là, Stathas se dirige de ce côté, et, en arrivant, fait ap-
					
		