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                         AU MOYEN-AGE.                           477
 pour fonder un empire et un gouvernement durable, à la féodalité
et aux malheurs qu'entraîna la souveraineté, morcelée presqu'à
l'infini; en présence, dis-je, de ces souvenirs, la reconstitution
des pouvoirs par l'Église et la royauté est un des faits les plus
grands de l'histoire, un fait qui nous frappe et nous étonne, et la
marche de ces pouvoirs nous apparaît accompagnée par une
marche égale du bien et de la civilisation. Mais doit-on s'arrêter
là, faut-il surtout retourner là ? Non ! Ce temps est passé pour
toujours. Le courant des siècles ne se remonte pas, et le tenter
serait folie.
   D'où viennent pourtant aujourd'hui ces préoccupations, ces
aspirations, ces jeux imaginaires de l'esprit public. Est-ce igno-
rance, est-ce illusion ? N'y a-t-il pas au milieu de tout cela un
sentiment juste, en même temps que noble et généreux ? oui ; il
y a un sentiment qu'il faut profondément honorer et respecter
même dans ses écarts, c'est celui du goût et de l'admiration de
la France pour son passé. Loin de le renier, elle y revient sans
cesse, et elle en est fière. Elle a raison, Messieurs. Le XVIIIe siè-
cle et les sophistes qu'il a engendrés, avaient prétendu faire
table rase et renouveler le monde. Notre siècle mieux inspiré a
compris que les traditions étaient bonnes pour les peuples comme
pour les familles, et qu'en améliorant le présent, qu'en travaillant
pour l'avenir, il fallait aussi reconnaître la dette du passé. Ce
que nous sommes, nous le devons à nos pères ; les biens dont
nous jouissons, ils les ont acquis. Ils ont fondé la gloire militaire
de la France, l'unité nationale, l'indépendance de la couronne ;
ils ont jeté les bases de toutes nos modernes institutions. C'est
par eux qu'a grandi l'Eglise, et qu'elle a réussi à mieux faire
entrer de jour en jour ses préceptes de justice et de charité dans
les relations humaines. Et, comme dans cette lutte du bien et du
mal qui fait le fonds de l'histoire, il n'y a jamais de temps, si
funeste qu'il soit, qui ait été deshérité complètement, le passé
nous offre toujours de grands noms, des qualités, des vertus pré-
cieuses et d'illustres exemples. Obéissons donc à ce sentiment
qui nous pousse à rechercher nos titres de noblesse et à étudier
nos gloires.