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	474 1>E LA PUISSANCE ECCLÉSIASTIQUE Je ne m'arrêterai donc qu'à deux propositions sérieuses ou plausibles, émises par les admirateurs trop passionnés du moyen- âge. On nous dit quelquefois que la limitation du pouvoir absolu était alors plus juste et plus efficace que de nos jours, parce que c'était l'église qui l'exerçait, et de plus on nous réprésente ce temps comme un temps de calme, d'obéissance presque passive et de foi aveugle. De ces deux propositions, l'une est une sorte de proposition savante, l'autre un préjugé populaire. Elles n'en sont pas moins deux erreurs. Pouf que la limitation du pouvoir absolu, par l'église, fût meilleure que les autres systèmes de limitation employés dans les temps modernes, il fallait deux choses. Il fallait qu'elle fût plus régulière et mieux acceptée. Était-elle plus régulière? non certes. J'ai cherché pendant tout le cours de l'année dernière à déterminer la constitution du moyen-âge, et n'y ai pas réussi. Aucun historien n'y a réussi jusqu'à ce jour. Nul n'a pu recons- truire un édifice qui n'a jamais existé, qu'en le remplaçant par une oeuvre d'imagination et de fantaisie, incapable de résister au premier souffle de la critique. C'est que le moyen-âge n'avait pas de constitution. Il avait bien des lois, des chartes, des privilèges, que les peuples et surtout l'église s'efforçaient de défendre. Les peuples avaient des intérêts et des droits assez puissants pour être respectés, mais comment l'étaient-ils ? Que de contestations, que de luttes, que de chocs violents parfois ! Depuis le règne de Philippe I er jusqu'à celui de Philippe le Bel, et je pourrais des- cendre jusqu'à une époque plus voisine encore, on suit perpé- tuellement la trace de ces rivalités des pouvoirs, qui, pour ne produire que de loin en loin d'éclatants orages, n'en attestent pas moins l'indécision de leurs frontières réciproques. Ces orages eux-mêmes étaient-ils moins terribles que ceux d'où nos révo- lutions modernes sont sorties ? Quant au calme prétendu du moyen-âge, renvoyons aux his- toriens des Croisades, aux Albigeois et auxVaudois, aux soulè- vements des Pastoureaux et des Jacques, aux conspirations, aux guerres civiles, aux Grandes Compagnies, aux rivalités des villes et des communes, soit entr'elles, soit avec les campagnes voi-
