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                           AU MOYEN AGE,                            467
vant une jurisprudence fixe, appliquant des lois constantes ; je
dis des tribunaux royaux , car ils n'étaient biques qu'à demi,
et les hommes d'église y conservèrent longtemps une. large place.
   Jusqu'à cette époque l'Eglise avait été la législature en même
temps que la magistrature du pays,- et, à ce double titre, elle
avait pu être regardée comme un des pouvoirs de l'Etat.
   Quoiqu'il n'y eût pas de constitution écrite et que les rois fus-
sent à peu près absolus , la législature et la magistrature n'en
étaient pas moins fort puissantes. Car, d'une part, elles étaient
les auxiliaires du gouvernement royal ; elles donnaient à ses
actes, par leur concours, la force morale nécessaire et une sorte
de légitimité. Et en même temps, quand le gouvernement abu-
sait de son autorité, et violait les droits, les libertés, les privi-
lèges si l'on veut, la législature et la magistrature, qui n'étaient
autre que l'Eglise, devenaient les interprètes de la justice, et sa-
vaient marquer des limites à la royauté. Elles étaient l'opposition
du temps, opposition qui n'a, pas plus que d'autre assurément,
le mérite de n'avoir été jamais tracassière, jamais intéressée. Mais
avec le mélange de bien et de mal qui est le partage des choses
humaines , elles étaient, à tout prendre, les organes les plus
éclairés de la société ; elles défendaietit ses droits , elles plaidaient
sa cause, et le crédit attaché à la robe sacerdotale ne les faisait
que mieux écouter. Un gouvernement durable n'est jamais ar-
bitraire; or le gouvernement de la France, au moyen âge, était
tempéré, contenu par les lois que l'église faisait et appliquait.
   Les papes n'étaient, visa vis des princes, que les chefs de celte
opposition, mais les chefs vénérés et redoutables, parce que plus
haut ils étaient constitués en dignité, plus leur intervention était
rare et forte en même temps. J'ai dû rappeler les principales
circonstances des rivalités de Philippe 1er contre Grégoire Vil,
de Philippe-Auguste contre Innocent 111, de Philippe-le-Bel
contre Boniface VIII, pour ne citer que les plus célèbres. Quel en
était le fonds invariable ? Des outrages à la morale publique et de
violents abus d'autorité. Le seul des rois de France qui, au lieu
de céder, ait brisé l'obstacle que rencontraient ses volontés, Phi-
lippe-le-Bel, a été en même temps le plus grand despote qui ait gou-