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• 240 PIERRE REVOIL. des horribles excès qui se commettaient alors dans les villes prises d'assaut. Reconnaissantes d"un aussi grand service, les hôtesses de Bayart dissipaient les ennuis de sa convalescence en lui faisant de la musique ; le moment où les deux jeunes Ita- liennes sont ainsi occupées à distraire leur hôte illustre, est celui que le peintre a choisi pour son tableau. Revoil, en plaçant, comme il l'a fait, le lieu de la scène dans une galerie décorée de trophées d'armes , de panoplies et de meubles curieux, s'était ménagé des moyens d'effet qui rentraient on ne peut mieux dans la nature de son talent ; aussi, s'accorde-t-on généralement à regarder ce tableau comme le meilleur de ses ouvrages. Bien différente en cela de l'Anneau de Charles-Quint, qui manque d'air , et dont les derniers plans, beaucoup trop rapprochés des premiers, semblent resserrer les personnages et l'action dans un étroit espace, la Convalescence de Bayart est d'une pers- pective parfaite, complétée par un effet de lumière très-heureux ; les accessoires , peints avec une exactitude et un relief qu'on accuserait, sans doute aujourd'hui, de trop de soin et presque d'exagération , ont prouvé et prouveront long-temps encore la supériorité de Revoil. C'est, du reste, ce tableau qui lui valut, avec un prix de trois mille francs, le titre de peintre de la Dauphine. Entre l'Anneau de Charles-Quint et la Convalescence deBayart avait paru, au Salon de 1812, le Tournoi de Rennes, que Revoil donna ensuite à la ville de Lyon, et qu'on peut voir au Musée du Palais-des-Arts, dans la galerie récemment consacrée aux peintres lyonnais ; quoique ce tableau ait été, par malheur, placé un peu trop haut, il est possible néanmoins d'apprécier encore toute la finesse et toute la grâce de son exécution. 11 est fâcheux, cepen- dant , que la couleur en soit si terne et si pauvre, car la compo- sition n'est pas sans mérite , et sa valeur ressortirait bien mieux sur un ciel autre que ce ciel gris de perle que ne rachètent pas des terrains sans vigueur et un soleil beaucoup trop pâle, même pour un soleil de Bretagne. Il est également regrettable que l'auteur, en vue de satisfaire à des principes hautement condamnés à l'heure qu'il est, et à juste titre , ait cru devoir idéaliser , comme il l'a