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% PIERRE REVOIL. 239 sence, l'âme de leurs tableaux. La grande qualité qui a fait le succès de l'Anneau de Charles-Quint, et qui, ad besoin, le recomman- derait encore à l'attention des artistes contemporains , c'est un sentiment très-net, très-vif et très-juste de l'élément pittoresque. Cet élément, commun à tous les ouvrages de Revoil, s'y fait peut-être plus remarquer encore que dans nul autre, bien diffé- rent en cela de l'élément sensible qu'on leur a toujours refusé, et avec juste raison ; l'étude patiente et la mise en œuvre, aussi consciencieuse qu'adroite, des armes, des costumes, des bijoux, des ameublements de l'époque , y occupent aussi une très-belle place. Ce sera dans l'histoire de l'art moderne en France un grand , un éternel honneur pour Revoil d'avoir fait ces recher- ches et créé ces tendances qui font revivre le passé avec tant de réalité et de vigueur, et lui redonnent, avec une vie nouvelle , les traits épars et la physionomie que la main du temps avait détruite. La Convalescence de Bayart, qui fut exposée plus tard au salon de 1817, ne fut pas une reproduction moins heureuse du sentiment pittoresque qui avait si fort séduit le public de ce temps-là dans l'Anneau de Charles-Quint : il est juste de dire aussi qu'à cet élément de succès s'en ajoutait un autre, résul- tant d'études plus avancées sur la couleur, et d'une meilleure entente de la lumière et du clair obscur. Revoil s'était, à ce qu'il parait, appliqué, d'après les conseils de quelques amis, hommes de franchise et de goût, à se compléter de ce côté-là , autant du moins que sa personnalité d'artiste lui avait laissé le pouvoir de le faire, et sans qu'on puisse néanmoins le ranger jamais dans la brillante phalange des coloristes, grâce à de nouvelles études bien dirigées ; sa couleur avait pris un éclat et un accent qui pouvaient passer pour une belle réussite. Tous ceux qui ont lu l'histoire du bon Chevalier sanspeur et sans reproche, si naïvement racontée par je ne sais plus quel chroniqueur assez obscur, connaissent l'anecdote de la conva- lescence de Bayart. Le héros français , blessé grièvement à la prise de Brescia dans le Milanais, fut, comme on sait, recueilli par une veuve et ses deux filles , qu'il préserva généreusement