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COLONNE DE CUSSY. 69 l'empereur Tibère. M. Girault ne néglige pas de consulter le ca- ractère artistique de la colonne pour désigner sa date ; il estime qu'elle est du meilleur temps, et qu'elle appartient conséquem- ment au siècle d'Auguste. Toutefois , s'il méconnaît de la sorte l'histoire de l'art, je conviens qu'en sens inverse de Moreau de Mautour, il respecte plus les enseignements de l'histoire. Tacite rapporte que Silius, après avoir franchi la frontière des Séqua- nes, hâta sa marche pour se porter sur Augustodunum. A douze milles de cette ville, Sacrovir et ses troupes se montrèrent en des lieux découverts, patentibws locis. Or, la colonne de Cussy est à dix-huit milles d'Autun. J'admets, si l'on veut, que Tacite n'ait pas parfaitement désigné la distance, j'admets que Silius, parti de Vidubia avec ses troupes, débouchait dans le bassin de Cussy, lorsque lui apparurent, en une situation découverte, Sacrovir et son armée ; mais ce que je n'admets pas, c'est un monument de ce genre élevé à la gloire d'un lieutenant de Tibère, le plus ombrageux des empereurs. Loin de glorifier ainsi son général et de lui décerner une colonne triomphale, Tibère, annonçant au sénat l'issue de cette expédition, ajoutait que l'in- surrection de Sacrovir était, au surplus, sans importance. Il est donc contraire au récit de Tacite et au caractère de Tibère, de dire que le monument de Cussy fut voté par le sénat en mémoire de la victoire de Silius (1). Au surplus, cet aperçu de M. Girault n'est pas de son invention. Le président Bouhier qui s'est beaucoup occupé de la colonne, et qui, tourmenté d'en découvrir l'origine, s'est livré à diverses conjectures, repousse cette assertion ainsi que celle relative à la victoire de Jules César sur les Helvètes. Après avoir scruté les annales de l'empire pour y trouver un fait de guerre plus favorable à l'interprétation du monument, il finit par l'attribuer à Probus. Assurément, aucun empereur, comme Probus, n'a mérité des arcs de triomphe de la Gaule reconnais- sante. Il la délivra de l'invasion et du joug des Barbares par d'é- clatantes victoires sur le Rhin. Neuf rois de diverses nations germaniques vinrent se jetter à ses pieds pour implorer la paix ; (1) "îà C.,Ânn. Iib.,\n.—Girault, Diss. sur la Colonne de Cussy. Dijon, 1821.