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SUR L'ENSEIGNEMENT DE LA PEINTURE. 289
« Les arts, à les prendre même dans ce qu'ils ont de plus imi-
tatif, ont pour but ou plutôt pour mission, non de copier la na-
ture servilement, mais de la représenter, et, en quelque sorte,
de la refaire, d'après un modèle intérieur, un idéal dont elle est
l'occasion nécessaire, mais qui a son principe dans le sentiment
inné du beau et du grand '. »
Que le jeune élève pense donc à tout ce qu'il lui faudra acqué-
rir pour parvenir seulement à bien comprendre le sens et la
portée de ces paroles ; car le beau idéal est en nous, il se sent et
ne se démontre pas. Nous allons tâcher de faire comprendre ceci
par quelque exemple pris dans la nature. Placez devant un arti-
san un tableau qui renferme toutes les qualités qui constituent
le sublime, il en sera frappé, parce que l'idée du sublime est en
lui, et que votre tableau en aura spontanément éveillé la pensée.
Talma, le célèbre acteur tragique, se plaisait à jouer ses plus
beaux rôles pour les représentations gratis ; parce que, disait-il,
il était certain d'être applaudi dans ses plus beaux moments, et
que les vers les plus sublimes de Corneille et de Racine ne man-
quaient jamais d'exciter l'enthousiasme. Donc, le sentiment du
beau et du grand est inné dans le cœur de l'homme. Le poète
l'exprime par un choix d'expressions inattendues qui surprennent
la pensée, en nous présentant l'action spontanée d'un noble sen-
timent, ou, par la magnificence du langage, il nous cause une
sorte d'enthousiasme mêlé de surprise et d'admiration.
Le peintre en cherche l'expression dans la beauté des poèmes,
la noblesse des sentiments et la magie poétique de la couleur ;
car la couleur peut aussi atteindre au sublime, comme on le voit
dans la Nuit du Corrége et dans la Descente de croix de Rembrandt.
Lorsque l'élève aura suffisamment étudié la partie pratique de la
peinture, il doit se rappeler sans cesse que cet art exige de la
poésie, même dans le genre le plus inférieur, et
S'il ne sent pas du ciel l'influence secrète,
Si son aslre en naissant ne l'a formé poète,
qu'il se réduise alors au genre des bambochades ou de la na-
ture morte; genres qui ont produit des peintres distingués, car
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