Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
               A MADAME



Il est des hommes nés sous une heureuse étoile :
La nature pour eux a soulevé son voile,
Et leur a découvert le travail ignoré
Qui s'accomplit en paix dans son giron sacré ;
A leurs jeunes amours tous les dieux sont propices,
De la Muse inconstante ils fixent les caprices,
Et les Grâces n'ont pas devant leurs yeux discrets
Retenu sans pitié leurs vêtements secrets.
Pendant qu'à ces heureux les jalouses déesses
De toutes leurs heautés prodiguent les richesses,
Plus d'un amant obscur dans l'ombre prosterné,
Les suit timidement d'un œil passionné ,
Et, baisant en silence un pan de leur tunique ,
Exhale en vains soupirs un amour platonique.
0 blasphème éternel des caprices du cœur !
Pour des amours si vrais, pourquoi tant de rigueur?
— Ce terrible secret, vous le savez, madame.
Avant d'être déesse , hélas ! la Muse est femme.
                                                  11