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290 SUR L'ENSEIGNEMENT DE LA PEINTURE. la perfection dans un genre inférieur est toujours préférable à la médiocrité dans un genre plus élevé ; mais que de qualités il faut encore acquérir pour atteindre à la perfection, même dans le genre le moins estimé ! Le sentiment de la couleur et du xîlair- obscur est indispensable ; il faut encore une grande dextérité de pinceau et surtout de l'invention, car, sans cette faculté, on sera toujours médiocre. C'est une des conditions de l'art, et il faut laisser le genre des bamboçhades comme la dernière ressource des artistes sans instruction et sans nobles sentiments; car celui qui sent battre son cœur à l'aspect des œuvres des maî- tres et de celles de ses contemporains, doit suivre l'impul- sion que lui donneront ses émules, et chercher dans un genre nouveau le moyen de les suivre, s'il ne peut les devancer dans la noble carrière. Mais si le jeune homme n'éprouve pas un ar- dent amour de l'art, un désir passionné de produire des œuvres supérieures à celles de ses contemporains, jamais il n'obtiendra un rang distingué parmi les peintres de son époque. Bufrenoy a terminé son poème de la peinture par cette leçon mémorable; Inventes, tu vivras !.. Rappelons sans cesse ce précepte, et mettons une persévérance opiniâtre à vaincre des difficultés qui se renouvellent de plus en plus, à mesure que nous parvenons à acquérir quelque talent ; car l'application perfectionne le ta- lent, et lorsqu'on n'en a qu'un médiocre, le travail et l'assiduité peuvent y suppléer ; il n'est rien auquel ne permettent d'attein- dre des efforts bien dirigés, sans lesquels aussi il est impossible de parvenir au moindre talent. Mais, pour cultiver les arts, il faut en avoir le génie. Le génie est un don de Dieu ! Car de même que la santé et la force ma- térielle et la perfection de notre être corporel tient à un équilibre parfait entre tous nos organes physiques ; de même le génie ou la perfection de l'intelligence de l'homme tient à un équilibre parfait, au point le plus élevé entre toutes ses facultés intellec- tuelles, le génie est une âme élevée dans laquelle l'intelligence, l'imagination et le sentiment sont dans une proportion élevée et en équation exacte, une âme qui a une vue pénétrante des idées, qui, pour ainsi dire, les incarne puissamment dans le marbre,