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ET SUR LA PEINTURE RELIGIEUSE. 153 s'mtëresseront-ils a l'invention ingénieuse du peintre ? Ils lais- sent derrière eux la ville, ses bruits , sa confusion, ses incer- titudes, ils cherchent le repos, la vérité absolue, l'immuabilité, comprendront-ils quelque chose à ces personnages imaginaires : la. ville de Lyon, le choléra, la guerre civile qu'on leur repré- sente, jouant un rôle dans le ciel, auprès de la Vierge Marie, du Christ, des saints et des anges? Ce mélange du sacré et du profane , de la fiction et de la vé- rité est regrettable. Victor Orsel a cédé en cela au faux goût établi en France dans le XVIIe et le XVIIIe siècle, et dont les habi- tudes existent encore à notre époque. Les maîtres italiens, gardiens des traditions de l'art ancien , créateurs de l'art moderne, et dont, à ce double titre, l'autorité restera toujours si grande , n'ont à ce que nous croyons, laissé aucun exemple qui justifie le parti adopté par Victor Orsel. Le Perugin * Garofolo, Ghirlandajo, fra Bartolomeo, Raphaël, André del Sarte, le Titien, le Guide , Paul Veronèse , pour ne parler que des plus célèbres, ont laissé de nombreux tableaux votifs , exécutés souvent dans des circonstances analogues à celles qui ont inspiré le tableau votif lyonnais, mais dans au- cune de ces peintures ils n'ont placé la fable à côté de la réalité. Les personnages fictifs étaient inconnus dans l'art antique ; ils l'étaient également dans les premiers temps de l'art chrétien. Les images antiques des fleuves, des villes, des passions , des vertus, etc,, représentaient, comme chacun sait, des divinités tenues pour réelles suivant les croyances du polythéisme. L'emploi des figures de convention ne remonte guère qu'au siècle de Léon X il fut amené par la confusion qui s'établit alors par le mélange de la forme antique avec la pensée chrétienne. Michel-Ange et Raphaël voulurent lutter avec les modèles qu'ils avaient sous les yeux ; ils essayèrent de créer et d'introduire dans leurs compositions des types reproduisant l'idéal suprême de la grandeur, delà force, de la beauté humaines, dérogeant ainsi aux exemples des maîtres primitifs, observateurs plus dociles de notre humble nature.