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56 ESSAI HISTORIQUE mière.époque du moyen-à ge, l'intervention de l'Eglise dans les affaires de l'Etat était générale. On ne pouvait rien faire sans elle, parce que ses ministres étaient les seuls dépositaires des lumiè- res en tout genre, et que son autorité était la seule aimée et res- pectée des souverains et des peuples. D'un côté, les souverains recouraient à son arbitrage dans leurs différents, de l'autre, les peuples invoquaient sa protection. Est-il donc étonnant que les papes aient regardé la puissance civile comme subordonnée à leur puissance : « il est facile, dit M. Gosselin, aujourd'hui à des écrivains superficiels ou passionnés, d'attribuer à l'ambition des papes le pouvoir vraiment prodigieux que leur attira ce concours de circonstances ; mais, outre que cet état de choses était tout à fait indépendant de leur volonté, n'est-ce pas une injustice manifeste d'attribuer à leur ambition un pouvoir qui leur était librement déféré par les souverains, autant par des motifs d'in- térêt que par des motifs de religion ,• ' et les papes, bien loin de mériter les reproches qu'on leur a fait depuis sur ce sujet, n'eus^- sent-ils pas été bien plus répréhensibles de refuser une autorité alors si nécessaire au bien de la Société et à la tranquilité des Etats (1) ? » Mais les détracteurs de la Papauté ne se donnent pas la peine de scruter les annales de l'époque passée, ils trou- vent plus commode de les juger avec les mesquines préventions de la leur. Si, au lieu, pourtant, d'ajouter foi aux frivoles dé^ clamations des sophistes qui les ont devancés, ils étudiaient l'his- toire dans sa source, ils ne se convaincraient pas seulement de la légitimité du pouvoir exercé par les papes, ils en admireraient encore l'immense bienfait; ils verraient que, si quelque ombre de justice s'est conservée au milieu des désordres du moyen-âge, si les peuples n'ont point succombé sous le joug brutal de la force, si quelques débris de liberté, de civilisation ont survécu à l'oppression et à la barbarie que le régime féodal faisait peser sur le monde, c'est à la supériorité du sacerdoce sur l'empire, à la suzeraineté des papes sur les rois que nous le devons. (1) Ce point est solidement établi par l'auteur du Pouvoir temporel du Pape au moyen âge. p. 484 et suiv.