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dait, en consacrait les revenus, s'élevant, chaque année, en temps
de paix, à 4,000 florins, à entretenir Szigeth, forteresse extrêmement
importante pour la sécurité de l'Autriche, car elle était située sur
une frontière sans cesse menacée par les Turcs. L'archiduc Ferdi-
nand de Styrie et le chapitre d'Agram eurent beau faire des repré-
sentations à l'empereur, Lang obtint l'abbaye. Ce que l'on avait
redouté arriva : les revenus cessèrent d'être employés à la défense
du pays.
    Tous les avantages temporels et l'espérance d'arriver aux plus
 hautes dignités de l'Église ne purent longtemps retenir le second fils
 de Lang dans l'état ecclésiastique. Les mauvais exemples de son père
 l'en détournèrent. Il fut alors envoyé à l'Université d'Ingolstadt, et il
 n'y avait pas étudié plus de six mois quand son père lui fit donner
 une charge de juge au Tribunal d'appel de Bohême. On ignore ce
 qu'il devint plus tard, non plus que son frère aîné.
    En embrassant le catholicisme, Lang avait conservé le principal
 instinct de sa race : l'amour de l'argent. Pratiquant habilement
 l'usure, il avait soin de remettre à ses emprunteurs moins de capital
 que n'en portaient les billets qu'il leur faisait souscrire, et il exigeait
 d'eux un intérêt bien supérieur au taux légal, qui s'élevait alors à
 6 %• Son meilleur agent pour ces sortes d'affaires était un de ses
 cousins, le libraire Isaac. Lang s'était bien gardé de rompre avec
 ses anciens coreligionnaires. Les liens qu'il avait conservés avec eux
 n'étaient cependant pas assez forts pour jamais lui faire négliger ses
 intérêts. Un jour, par l'intermédiaire d'un juif, il avait prêté une
 forte somme à un autre juif nommé Zrini. Le débiteur devint insol-
 vable. Lang ne pouvait se résigner à perdre une créance ; il posa aux
 principaux juifs de Prague l'alternative entre cautionner la dette ou
 être expulsés de la ville : ils cautionnèrent.
    Les juifs ne perdirent pas à ce marché. Lang ne tarda pas à les
 indemniser, sans qu'il lui en coûtât rien. Ils avaient, en effet, formé
'le projet de fonder, au sein de la chrétienté, une vaste confédération.
 Ils se rendirent pour cela à Francfort-sur-le-Mein en 1603, rédigèrent
 un nouveau code juif et créèrent un trésor central. Ils se propo-
 saient de se soustraire peu à peu à toute juridiction chrétienne, et