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336 LA REVUE LYONNAISE Les Pans habite-monts, les ombreuses Dryades, Les Silvains corne-pieds et les moites Naïades Ont apris mes regrets! Voire et jà mille fois, M'ennuyant d'ennuyer de mes plaintes nos bois, J'ay souhaité finir mes larmes et ma vie Par les vagues déserts où plus l'herbe est fanie, Où les tigres, les loups et les ours vont rampants, Où les prés venimeux bouillonnent de serpents, Où gémit la fresaye (i). Et d'exil volontaire, Vray citoyen du monde, ay souvent voulu faire Comme Socrate fit, soy-mesme bannissant, Comme de gré Solon Athènes délaissant, Et Rome Scipion. Voire et mesmes encore Sans vous, sacré troupeau, sans vous, sœurs que j'honore, Sans vous, je le feroys, tant mes tristes malheurs Font mon espoir petit et grandes mes douleurs! Mais le voile d'erreur coiferoit bien mon ame, D'en accuser cet astre, et non l'envie infâme, Non l'impiteuse mort Nous apprenons ainsi que Christophle perdit ses parents jeune, qu'il hérita d'un procès fécond pour lui en conséquences désa- gréables, que les ennemis et les envieux ne lui manquèrent pas, enfin que, sans son amour pour les Muses, il n'aurait pas survécu à ses malheurs, mais nous n'en savons guère plus sur sa position sociale, sur les lieux qu'il a habités, sur le milieu dans lequel il a vécu, sur les événements auxquels il a pu se trouver mêlé, enfin sur cette foule de détails personnels qui constituent l'intérêt principal d'une notice biographique. Quel est le procès dont parle le poète et qui paraît lui avoir causé tant d'ennuis? La seule trace que nous ayons pu en trouver est la note suivante, qui figure à la date de 1604, dans les papiers du bailliage royal d'Annonay : Distribution du samedi 1" may 1604. Bénéfice d'inventaire de Me Men- tion Gamon, contre Mes Théodore et Christophe Gamon. En marge on lit : Sera rapporteur le lieutenant de bailly. (1) La fresaye ou l'effraye, nom vulgaire de la chouette.