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                          LE SALON DE 1885                          131

    Le Bois sacré, malheureusement, est le somptueux vestibule d'un
 édifice dont les pièces sont mal meublées, et il a le défaut grave d'en
faire ressortir davantage la pauvreté.
   L'ensemble du Salon, en effet, comme celui des Salons précédents,
accuse de plus en plus les tendances envahissantes de la peinture de
genre ; et il faut encore se féliciter que, avec cette pauvreté d'inven-
tion qui pousse les artistes contemporains à la reproduction perpé-
tuelle des scènes banales et domestiques de la vie, les procédés
impressionnistes ne fassent pas de plus rapides progrès.
  Pas une œuvre historique, à moins qu'il ne faille maintenant
donner ce nom à des toiles telles que la Mort d'un héros, de
M. MOREAU DE TOURS (433), et le Commandant Beauregard salué par
Brunswick, de M. Jacques SCHERRER (560); deux peintres estimables
cependant, dont ce ne sont là, j'aime à le croire, que les cartes de
visite.
    Quant à la peinture religieuse, j'aurais été absolument convaincu
qu'elle n'existe plus, sans un remarquable envoi de M. Paul-Hippo-
lyte FLANDRIN. Je ne connais pas assez M. Flandrin pour oser dire
qu'il fera revivre parmi nous les grandes traditions artistiques dont son
oncle fut, il y a quelque quarante ans, le si glorieux représentant ;
mais ses débuts me font espérer qu'il saura recueillir dignement le
lourd héritage de son nom. Il y a dans sa Résurrection de la fille de
Jaïre{2/\j(), malgré quelques défaillances de dessin, des qualités supé-
rieures de composition. La figure grave et douce du Christ est traitée
avec une réelle grandeur ; le sentiment de foi profonde mêlé de
 stupeur qui a dû agiter les spectateurs, se lit sur leurs physionomies
 et dans leurs attitudes ; on sent bien surtout, dans celle de la jeune
 fille à demi soulevée sur son lit funéraire, le souffle surhumain qui
 ranime son être. Toute cette scène est bien conçue, bien éclairée,
 et animée d'un profond sentiment religieux.
   Une autre toile cependant, bien que, par sa composition, elle soit
 plutôt une œuvre de genre, me paraît pouvoir être rapprochée de
 celle de M. Flandrin; ce sont les Pèlerins de M. D. LAUGÉE (367),
 qui donnent, dans une autre note, l'expression des mêmes senti-
 ments. Deux vieilles femmes sont debout devant la madone; l'une