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SUR LE PONT DE SAÔNE I47 un gouvernement agité par les factions, ils auraient pu aisément se dérober à l'attention publique pour n'être que des citojrens laborieux et honnêtes. Us aimèrent mieux, porté plainte au roi, celui-ci s'empressa d'adresser au bailli de Mâcon, sénéchal de Lyon, la lettre que voici : « CHAELF.S, par la grâce de Dieu, roi des Français, au bai'li de Maçon ou à son lieutenant, salut. « Les consuls et habitants de la ville de Lyon nous ont fait de grosses plaintes de ce qu'ayant fait un traité avec le capitaine que nous avons établi dans ladite ville pour une somme d'argent qu'ils lui devaient pour ses gages et au-delà de laquelle il ne peut ni ne doit exiger quoi que ce soit, cependant ledit capitaine a taché de tirer argent des Juifs, qui contribuent avec lesdits complaignants à la somme qui a été accor- dée audit capitaine et qui d'ailleurs par le privilège que nous leur avons accordé sont exempts de guet et garde. Et, sur le refus qu'ils ont fait de lui donner des gages, il en a fait prendre, arrester et emprisonner quelques-uns, ce qui leur est d'un grand préjudice et dommage comme ils disent, nous suppliant d'y pourvoir. « C'est pourquoi, nous vous mandons et commandons qu'après avoir appelé ceux qui devront être appelés, si vous trouvez que la chose soit aiusi ; vous défendiez ou fassiez défendre de notre part audit capitaine d'inquiéter,molester ou vexer les Juifs soit en leurs corps, soit en leurs biens à cette occasion, mais que s'il s'est fait quelque chose au contraire, vous le révoquiez et réduisiez toutes choses en leur premier état, en contraignant ceux qui devront être contraints et recevant les causes d'opposition, s'il y en a entre les parties. Et qu'après les avoir ouïes vous Içur rendiez bonne et due justice, nonobstant toutes impé- trations ou subreptions à ce contraires. « Donné à Paris le 20 janvier 1387. » Informations ayant été faites suivant l'ordre du roi et « la chose » ayant été trouvée ainsi que le disaient les Juifs, Mouffeton de Viégo fut destitué et son emploi donné à Guichard de Saint-Priest. V. Menes- trier, Histoire civile et consulaire de- Lyon, p. 526. Ainsi donc la justice de Charles VI, sourde aux plaintes des chrétiens contre les Juifs qui les pillaient, s'empressait d'accueillir, pour peu qu'elles fussent fondées, celles des juifs contre des chrétiens même haut placés.