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3252                     BIBLIOGRAPHIE.

je le crois, les leur abandonner; cette concession ne saurait
 rien compromettre. Le théâtre est mauvais! Tant pis, c'est
l'affaire des poètes de se laver du reproche ; qu'ils règlent
leurs comptes avec la morale, le théoricien n'a que faire de
s'en mêler. 11 est vrai que les philosophes vont plus loin : le
 théâtre, d'après eux, ne peut guère être autre chose que ce
qui est; avant tout, en effet, les auteurs visent au succès ; or,
on sait que le moyen d'y parvenir n'est pas de contredire les
passions de la multitude, mais de les flatter. 11 y a là un dan-
ger, il faut en convenir ; mais il ne menace que les auteurs,
non l'art dramatique lui-même. Qu'à force de génie ils tâ-
chent de s'y soustraire, et les philosophes feront aussitôt la
paix ; qu'ils parviennent, s'ils le peuvent, a réformer leur pu-
ditoire et à épurer la scène, et les anathèmes des moralistes
cesseront de les poursuivre.
    Tout peut se concilier, on le voit, et M. Duparay s'est trop
hâté, à notre avis, de se prononcer pour les poètes contre les
philosophes. Au fond, ces derniers ne sont pas si intraitables
qu'on veut bien le dire, et, pour peu qu'on se montre raison-
nable, on finit par s'entendre avec eux : ils trouvent à redire
dans les tragédies de Corneille, mais ils acceptent, je le
crois, d'assez bonne grâce, sa théorie dramatique, telle que
l'expose M. Duparay. Oui, une belle pièce de théâtre est un
bien, non un mal ; mais, pour qu'une pièce soit belle, il faut
que le poète se préoccupe moins de frapper fort quede frapper
juste; qu'ils'appliqueàébranlerdansfâmeduspeclaleur, non
pas la fibre la plus sensible mais la fibre la plus noble ; que
l'impression définitive qu'on emporte d'une représentation
dramatique soit saine aulanl que forte, généreuse autant que
vive : une belle pièce est un bien ; mais ce n'est pas à dire
que la scène soit une chaire de morale, et que les comédiens
soienl les véritables prédicateurs des empires, comme on le
prétendait naïvement du temps de Voltaire. Dans la pensée