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226           NOTICE SUR M. DE I.EZ.VY-MARNËSIA.

 de son père la permission de partager ses hasards. 11 quitta
son régiment et vint à Paris. De derniers arrangements, né
cessaires au départ, prolongèrent son séjour dans cette ca-
pitale. 11 en profita pour suivre les séances de l'Assemblée
constituante ; ses délibérations, fécondes en orages, ses dé-
bats, où venait expirer par lambeaux une monarchie de
quatorze siècles, donnèrent l'essor a sa pensée. 11 vit, dans
ces luttes puissantes, s'écrouler, sous les coups du premier
bélier parlementaire, ces vieilles institutions aristocratiques,
indispensables à l'établissement de la liberté constitution-
nelle. Il entendit tous les grands orateurs des deux camps
si profondément divisés. S'il ne put refuser son admiration
à l'éloquence d'un Mirabeau, d'un Barnave et de tant d'autres
hommes célèbres de leurs rangs, il reçut, du talent et du
courage des derniers soutiens d'une cause a jamais perdue,
les Maury, les Lally-Tolendal, les Mounier, les Clermont-
Tonnerre, une impression qui, loin de s'affaiblir dans le
cours de sa vie, grandit jusqu'à devenir un culte pour leur
mémoire.
   Quoi qu'il en soit, son Odyssée débuta sous de funestes
auspices. Le départ de la colonie eut lieu au mois de
mai 1790, sur un brick dont la grandeur et les aménage-
ments n'étaient en rapport ni avec le nombre des passagers,
ni avec la masse du matériel embarqué. L'encombrement,
les privations , tous les désagréments qu'entraînent une
longue navigation , portèrent souvent jusqu'à l'exaspéra-
tion le mécontentement de la foule disparate, incohérente,
inconsidérément choisie, plus inconsidérément payée, com-
posant le printemps sacré du noble exilé de Saint-Julien. 11
en résulta que plus d'une fois, durant la traversée, la sûreté
commune se trouva sérieusement compromise.
   Enfin, après neuf mois de souffrances, la brise de terre
signala l'approche du continent. On entra dans la baie de