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CORRESPONDANCE. (57 conservé que quelques vaines apparences de l'ancienne indépen- dance municipale. Dans cet état, on ne pouvait que lui repro- cher d'être le double instrument des exactions de la cour et de celles des gouverneurs qui levaient une liste civile sur nos pau- vres finances. M. Péricaud va me fournir lui-même l'occasion d'en citer un exemple. Il a raconté une curieuse anecdote qui suivit l'émeute de 1714, amenée par un sur-octroi sur l'entrée de la viande. L'ordre était déjà rétabli, lorsque le fugitif de Ramillies (l'expression est de M. Péricaud) vint militairement occuper les approches et conquérir les portes de la ville, ouvertes sans coup férir avant son arrivée ; puis, cet exploit terminé, il s'en fut triompher à Versailles ; mais ce triomphe fut salué par de nouvelles chansons. Or, ce guerrier, dont l'épée , suivant les chansonniers, était restée pucelle dans son fourreau, ce guer- rier qui ne serait que ridicule s'il n'avait pas coûté de cruels et sanglants désastres à la France, s'était fait payer en quelques années environ un million sur le trésor municipal, au sein de nos revers nationaux, de notre détresse particulière et des con- tributions de toutes sortes forcées ou volontaires, payées au tré- sor royal dans ces dures années de la décadence du grand règne, et cela indépendamment de ses pensions ordinaires sur nos octrois et des cadeaux prodigués à toute sa maison. Eh ! bien, il y eut des consulats pour -autoriser ces prodigalités envers le favori du roi. On accable ce quasi-roi d'adulations aussi basses que ridicules, dont les témoignages sont enregistrés aux actes consulaires. S'il se lait prendre sottement par les Impériaux à Crémone, on lui écrit pour mettre humblement à sa disposition les fortunes publiques et privées; on le supplie de ne pas les ménager. S'il est malade , on ordonne des prières publiques pour sa santé, on constitue une pension à son médecin et on alloue 12S0fr. pour les frais d'une messe d'aetionss de grâce après sa guérison. Cependant des plaintes s'élevaient de temps à autre contre les prodigalités consulaires, et ces plaintes se faisaient jour ordinai- rement dans les moments critiques où le Consulat se croyait obligé de convoquer l'Assemblée des notables. Ainsi, en 1677, la ville en était à ne plus pouvoir faire le service de ses rentes ; on avait fait ordonner une réduction des trois quarts par un arrêt du conseil. Dans cette extrémité, le Consulat avait convoqué une Assemblée des notables, ce à quoi il" répugnait à peu près autant que le Roi à la convocation des étals-généraux. Mais là , par la bouche des principaux officiers de k justice, il lui est re- proché d'avoir ruiné la ville par une mauvaise gestion. On va jusqu'à mettre en doute, si des dettes ainsi follement contrac- tées obligeaient réellement le corps de la communauté. En 1760, c'est le Président au.siège présidial, M. Pupil de Myons et le procureur du Roi, M. Peysson de Bacot, qui répèlent les mêmes censures dans les termes les plus véhéments. M. de Bacot leur