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406 DISCOURS DE M. TABAREAU. baron Thenard, dont le nom se retrouve ^ans toutes les phases progressives des sciences, avait depuis longtemps doté nos prin- cipaux collèges de riches collections de physique, de chimie et d'histoire naturelle ; des professeurs habiles et nombreux prépa- raient déjà dans ces mêmes collèges les brillants succès des écoles savantes de l'état, et, bien loin d'être surpris par les nouveaux programmes, ils doivent au contraire les trouver encore au- dessous de leurs aspirations Dans le concours de tous à assurer le succès d'une grande pensée de progrès, les Facultés des sciences se placeront à la hauteur des nouveaux devoirs qui leur sont imposés : dispensa- trices, avec les Facultés des lettres, du titre d'honneur dont elles décoreront le double mérite littéraire et scientifique, elles pro- portionneront la sévérité de leurs jugements à l'éclat de la dis- tinction, et les palmes obtenues par les nouveaux bacheliers des sciences apprendront bientôt que le temps était venu d'ouvrir dans nos écoles l'ère scientifique de l'intelligence, sans compro- mettre aucun de leurs premiers succès littéraires. J'annonce l'avenir, et je ne dois pas m'étonner de trouver, à côté de mes espérances, l'inquiète hésitation de la prudence humaine à s'engager dans des voies nouvelles. La publication des programmes détaillés des nouvelles études a déjà fait évanouir bien des craintes ; je m'estimerais heureux s'il m'était donné de pouvoir les dissiper entièrement. Mon oreille attentive a recueilli tous les regrets du passé, toutes les appréhensions de l'avenir : des amis exclusifs des let- tres nous ont menacés d'une déchéance littéraire ; d'autres, dis- tinguant dans l'homme l'être moral de l'être pensant, ont cru trouver la cause d'une déchéance morale encore plus affligeante, dans le développement d'études scientifiques qui n'exercent que la seule intelligence. L'erreur est allée plus loin, et, dans ses sinis- tres pressentiments, elle a lancé contre les nouvelles écoles des sciences le reproche si grave de la matérialisation des esprits, premier pas dans la voie flétrissante qui conduit au matérialisme. A ceux qui craignent de voir un jour s'éteindre les sentiments généreux, les grandes qualités du cœur, les nobles passions, non.?