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                      H. W. LONGFELLOW.                        171
levait ses bras chenus, et toutes les larges feuilles sur ma tète
 frappaient de leurs petites mains en signe de joie avec un bruit
 continuel ;
    « Un bruit assoupissant, un bruit qui apporte avec soi les
 sensations du rêve, le murmure profond résonne sur le pré,
 le lac et le ruisseau comme le frôlement d'ailes innombrables,
 ou les vibrations prolongées de la cloche dont les balancements
 ont cessé.
    « Et des songes de ce qui ne peut mourir, des visions bril-
lantes venaient à moi, pendant que plongé dans ma pensée je
restais à contempler le ciel d'été où couraient à toutes voiles
les nuages, comme les vaisseaux sur la mer ;
    « Songes qui attirent l'âme de la, jeunesse avant que l'ima-
 gination soit épuisée, légendes des pages monastiques, traditions
 des sages et des saints, vieux contes poudreux et chroniques
 des anciens jours !
    « Et amoureux encore de ces thèmes d'autrefois, même dans
la foule qui peuple les cités, je sens la fraîcheur de ces eaux
courantes qui, semées d'ombres et de rayons de soleil, baignent
la verte patrie des rêves, la Terre-Sainte de la poésie.
    « C'est pourquoi à la Pentecôte qui amène le printemps vêtu
comme une fiancée, lorsque les boutons semblables à des oisil-
lons dans le nid, déploient leurs ailes, lorsque les bonnets d'é-
véque ont des anneaux d'or, rêvant à bien des choses, j'allai
trouver les grands bois.
    « Les arbres verts chuchottaient d'une voix douce et assou-
pie : c'était un chant d'allégresse ! Ils furent les compagnons
de jeux de mon enfance, et me bercèrent dans leurs bras sau-
vages. Ils me regardaient et me souriaient encore comme lors-
que j'étais jeune garçon;
    « Et toujours murmurant doucement et à voix basse, ils di-
saient : viens avec nous ; sois enfant de nouveau. Et ils balan-
çaient ça et là leurs ' longs bras, m'invitant d'un geste lent et
solennel. Oh ! que pouvais-je faire, si ce n'est d'aller, dans les
antiques forêts, chercher l'air joyeux et vivifiant, le bois solen-
nel et silencieux de toutes parts ! La nature, les mains jointes,