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282          SUR L'ENSEIGNEMENT DE LA PEINTURE.
magistrat de la cité ! Son orguril est à son comble, il se croit
un être important à l'État; et pourtant, sachant tout au plus
dessiner et peindre une tête ; bientôt il sera réduit à faire de
méchants portraits et à donner des leçons pour soutenir l'écl at
de son auréole académique. Mais , direz-vous, voyez Trimolet,
Jacquand , Biard (l), et tel autre que la réputation et la fortune
ont comblés de leurs faveurs ? Et, qui vous dit que c'est dans
votre école qu'ils sont devenus illustres ? Ils y ont appris l'al-
phabet de la peinture * sans doute, mais les maîtres qui les
ont instruits n'avaient pas besoin d'être soldés par l'État, pour
leur enseigner l'art de peindre.
   Laissez donc aux peintres eux-mêmes le soin d'ouvrir des
écoles et d'y former des peintres, ils sauront distinguer le bon
grain de l'ivraie, et faire fructifier le germe du vrai talent.
Lorsque l'élève contractera, avec le maître, une obligation pé-
cuniaire , il écoutera mieux les conseils, et ses parents ne se
laisseront pas séduire par de fausses dispositions, lorsqu'elles
leur seront signalées par un professeur rétribué par eux, ce
qui est sans effet dans les écoles gratuites ; en outre , ceux qui
étudieront sérieusement ^sortiront d'une classe assez opulente,
pour avoir reçu l'éducation et l'instruction nécessaire au déve-
loppement de leur génie. Alors, nous pourrons espérer de
voir, parmi nous , des peintres qui sauront se rendre bien au-
trement illustres par l'esprit et par l'élévation de leurs pensées,
que par l'éclat de leur couleur, et par l'adresse du pinceau.
Les beaux arts ne peuvent pas plus être enseignés que prati-
qués en manufacture ; et c'est une des plus vicieuses de nos
institutions que l'organisation de ces écoles, dans lesquelles on
prétend former des peintres, des sculpteurs et des architectes ,
 comme on dirige des ouvriers dans une fabrique, ou les éco-
liers dans un collège. N'esMl pas étrange d'entasser pêle-mêle
trois ou quatre cents jeunes gens pour en faire des peintres,

  (I) Ce^sont précisément cestaleiitsOà dont la Providence est avare, et
auxquels il né faut que donner l'impulsion penT les développer ; mais le
nombre en est très restreint.