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            SUR L'ENSEIGNEMENT DE LA PEINTURE.                 275
admiration pour l'oeuvre du pinceau de l'artisan dura pendant
plusieurs siècles, avant que la poésie vînt prêter quelques char-
mes à une imitation plus que naïve de la nature. Les progrès
de la civilisation amenant peu à peu le goût des belles-lettres ,
le peintre sentit alors que son art pouvait s'élever à la hauteur
de Virgile et d'Homère ! Dès le commencement du XVe siècle,
Masaecio, Benozzo Gozzoli , André Verroechio, Pietro Peru-
gino et quelques autres commencèrent à imprimer une sorte
de beauté idéale, une sorte de caractère surnaturel aux divers
personnages de l'Ecriture sainte, à la Vierge, aux Anges, au
Christ, et ces différents caractères ont servi de type aux pein-
tres qui leur ont succédé. Ce premier pas dans la carrière poé-
tique, ce premier effort du génie M le précurseur de ces hommes
extraordinaires qui parurent presque en même temps sur tous
les points de l'Italie , et qui, au sortir de l'enfance , ont porté
l'art au plus haut degré de perfection : Raphaël à Rome, Michel-
Ange à Florence, le Corrége à Parme, Léonard à Milan, le Titien
 à Venise , et chacun dans un style différent, chacun avec des
procédés qui lui étaient personnels, et par lesquels on recon-
naît ces diverses Ecoles. Développer les causes qui ont produit
spontanément ces différents génies, ce serait vouloir expliquer
des mystères auxquels il ne m'appartient pas seulement de tou-
cher. Si le Créateur a fixé certaines époques pour répandre tout
 à coup ses trésors; si les progrès de la civilisation conduisent
l'esprit humajc jusqu'à un point de perfection qu'il ne doit pas
dépasser, et au-delà duquel il ne peut arriver qu'à la corrup-
tion, à la décrépitude ou à la barbarie ? C'est une question que
j'indique seulement pour inviter quelque savant idéologue à
l'approfondir.
   Dans les sciences exactes , toutes les connaissances acquises
se transmettent d'une génération à l'autre, et servent progres-
sivement au développement de nouvelles découvertes ; dans les
arts libéraux, la progression des découvertes s'étend à peine à
la partie mécanique de l'art; tout ce qui tient à l'invention, à
la poétique, à l'expression, s'éteint et meurt avec le peintre
comme avec le poète. A peine le peintre peut-il transmettre Ã