page suivante »
•f A. BRISEtX. 129 S'échappait, et d'un boud franchissait le talus, . " Le taureau, survenant à la fatale borne, Dans le ventre du loup plongea sa double corne, Et là , durant deux jours, au-dessus du fossé, Comme au bout d'une fourche il le retint fixé ! Et les chevaux, les bœufs, les vaches, les cavales S'attroupaient pêle-mêle, et tous par intervalles Du côté des maisons galoppaient pesamment, Et poussaient à la fois un long mugissement ; Le village accourut : sur sa noble conquête L'immobile taureau tenait encore sa tête, Mais il s'était usé par un si rude effort, Il releva son front et puis il tomba mort. A ce récit des cris de joie et de colère En l'honneur du taureau retentirent dans l'aire ; Quelques-uns de plaisir secouaient leurs cheveux, Où, comme pour lutter, tendaient leurs bras nerveux. Les œuvres d'art, qui ne valent que par le côté dramatique, passent avec les formes de la sensibilité d'une époque. Les atten- drissements sont capricieux. A part un très-petit nombre de sentiments éternels et qui n'ont pas varié d'Homère jusqu'à nous, les causes de nos mélancolies tiennent un peu de la mode du jour. Le style et la pensée, plus que l'émotion, font vivre la poésie : les Bretons vivront par le mérite du style, par la sim- plicité des sentiments, et aussi par leur valeur comme his- toire ; quelque jour, on ira dans ces vers chercher l'Armorique du présent et du passé, de même que l'on cherche aujourd'hui les anciens peuples dans leurs poètes, leurs seuls, ou du moins leurs plus fidèles historiens. Les Ternaires représentent la partie purement lyrique de l'œu- vre de M. Brizeux. Dans ces pièces, comme dans les récits, nous sommes frappés par un sentiment moral simple et mâle qui nous rappelle la sagesse antique. Le ton didactique s'y mêle souvent et naturellement à l'élégie et à la chanson. Le dernier recueil du poète breton, Primel et Nola, nommé ainsi de la pièce principale, est formé de courts poèmes et de morceaux lyriques. Lina, le vieux Rob, les hêtres de Lo-Thea 9