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1 DE LA PHILOSOPHIE SCOLASTIQUE. 115 qu'encore on ne s'est pas placé au point de vue d'où on pouvait la comprendre et la faire. Le véritable problême de la nature et de la portée de la scolastique, bien loin d'être résolu, n'a pas même été nettement posé ; et c'est peut-être parce qu'on ne l'a pas posé et que, dès-lors, l'on s'est engagé au hasard dans l'é- tude des doctrines, que l'on a fouillé, sans grands résultats, la poussière des bibliothèques. Au milieu de tant de docteurs et de principes qui ont régné pendant cinq cents ans, lesquels choi- sir pour les soumettre à une longue analyse? où trouver un fil conducteur qui dirige la science dans le labyrinthe de tant d'i- dées, dont des milliers doivent être négligées, dont quelques autres, au contraire, ne sauraient être pesées avec trop de scru- pule ! Comment, en un mot, s'orienter dans ce monde intellec- tuel, si vaste, si obscur, si différent du nôtre, et dans lequel il ne faut omettre aucun élément essentiel, bien que l'on soit contraint de laisser de côté d'innombrables détails ? Là est la difficulté, difficulté contre laquelle on n'a pas assez lutté, parce que l'on ne pouvait en avoir au premier abord qu'une vague conscience, mais qui doit commencer, après tant de travaux, à être clairement comprise. Cette difficulté, si grande qu'elle soit, n'est peut-être pas insurmontable ; et, en se plaçant au point de vue d'un certain but à poursuivre et d'une certaine question à résoudre, il nous semble que tous les faits se classent, que toutes les théories s'éclaircissent et que l'on peut démêler, entre tant d'idées, celles qui n'ont joué qu'un rôle insignifiant et celles qui, dominant toutes les autres, ont fait à l'esprit hu- main ses destinées. Quel est donc ce but que nous devons poursuivre dans l'his- toire de la philosophie au moyen-âge? Quel est le problême dont elle doit nous donner la solution? Nous vivons, depuis plus de deux siècles, sur un préjugé éga- lement exploité par les partisans et par les adversaires du Chris- tianisme. On suppose généralement que la renaissance a fait une scission complète avec le moyen-âge. L'âme du moyen- âge, répète-t-on, c'était le dogme catholique devant lequel s'in- clinaient respectueusement ses plus illustres docteurs, jaloux