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110               HISTOIRE DES JOURNAUX DE LYON.
   Un article sur la paix perpétuelle, rêve renouvelle de l'abbé
de Saint-Pierre, mais à qui les événements présents donnaient de
l'importance et de la gravité, attira les regards de l'autorité et
valut à son auteur de sévères observations. Les rédacteurs de la
feuille furent mandés à la préfecture , et peu s'en fallut que le
Bulletin ne fut supprimé. Il n'obtint grâce qu'à la condition de
montrer plus de prudence à l'avenir. On peut donc être étonné
que la biographie Michaud ait fait de cette aventure un titre de
gloire pour Fourrier et l'ait présentée comme une occasion de
fortune. Voici le passage :
   « La plus grande partie de sa vie diurne s'écoula entre le comptoir et le
livre à partie double. En 1827, il était encore chargé de îa correspondance
d'une maison américaine, située rue du Mail. Plus d'une fois pourtant il n'eût
tenu qu'à lui de se faire une position, en i8o3 surtout, lorsqu'il publia à Lyon,
dans un journal dont Ballanche était imprimeur, un article sur la politique
européenne , qui traçait le plan que Napoléon, alors premier consul, a cons-
tamment tendu à réaliser. Cet article fut à peine arrivé à Paris, que le gou-
vernement envoya l'ordre à Dubois, commissaire général de la police à Lyon,
de s'informer quel en était l'auteur. M. Ballanche , mandé à la Préfecture ,
répondit que la signature Fourrier (il signait alors avec deux r,) n'était pas
pseudonyme , et que celui qui avait écrit cet article était un jeune commis
marchand de drap de la maison Bousquet : et il ajouta l'éloge du caractère
plein d'honneur et des connaissances de Fourrier. M. Ballanche avertit Four-
rier de l'attention que le gouvernement venait de donner à son article ; celui-
ci s'y montra très-indifférent, et l'affaire en resta là  »

   Contrairement à l'avis de M. Parisot, l'auteur bienveillant de
la notice donnée par la biographie Michaud, nous croyons qu'il
est heureux pour Fourrier que l'affaire en soit restée là. Le pre-
mier consul n'aimait pas qu'on s'occupât si publiquement de la
marche qu'il avait à suivre. Partager la Prusse, démembrer l'Au-
triche et se mesurer ensuite avec la Russie pouvait lui sourire.
Etre maître seul de l'Europe, y établir la paix universelle à l'aide
d'un gouvernement unique pouvait encore lui apparaître comme
un rêve amusant et flatteur, mais le futur empereur ne devait
pas être satisfait de voir présenter comme réalisables des projets
qui, pour avoir traversé sa pensée, n'en avaient pas moins dûs