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347 complète qui existe de la lutherie italienne, est chose digne d'admiration. Un beau jour arriva à Lyon cet Italien., Son extérieur était ignoble ; la nature l'avait pourvu d'une figure basse et d'une structure informe. Il a la face plate, courte, jaunâtre, les yeux petits et enfoncés, la bouche jusqu'aux oreilles , la voix gron- deuse; par ma foi, sa tête ressemble à une coquille de basse, et ses jambes à des manches de contrebasse. Lorsqu'il vint à Lyon , à peine prononçait-il quelques mots de français. Il por- tait au bout d'une perche, comme un marchand de mort-aux- rats, quatre ou cinq violons achetés en Italie, qu'il voulait re- vendre en France. Depuis il renouvela si fructueusement le voyage , que chaque fois la collection augmentait et qu'aujour- d'hui il arrive avec des caisses toutes pleines d'instrumens. Et ne lui achète pas qui veut! un marché avec lui devient aussi difficile à régler que la créance américaine ; et surtout gar- dez-vous j par ruse d'acheteur, de déprécier le chef-d'œuvre que vous marchandez ; mieux vaudrait blasphémer Dieu devant le grand inquisiteur d'Espagne ! Mais si vous voulez vous bien loger dans son esprit, mettez- vous à genoux devant un beau Stradivarius; alors les aspérités de cet ours italien disparaîtront, sa face bourrue s'épanouira, sa langue deviendra jaseuse, il vous laissera pénétrer dans les mys- tères qu'il a recueillis à Crémone , à Brescia ; car dans ces villes, berceaux de la lutherie , il a interrogé tout ce qui en avait sou- venir ; maintes fois il est entré dans la boutique qu'occupa Stra- divarius, il a touché un rabot que sa main maniait il a causé avec des gens qui ont vu Joseph Guarnerius, il a pénétré dans les galeries d'instrumens des princes et des ducs, et là , fouillant les étiquettes, étudiant les formes, comparant ce qu'il avait vu avec ce qu'il voyait ; il a patiemment construit la généalogie de sa religion à lui. Et moi j'ai tâché de lui arracher les trésors pro- fondément enfouis dans sa mémoire; il m'a fallu l'exploiter comme une mine, avec la pioche et le pétard, et encore n'ai-je pu lui enlever que par lambeaux les secrets de son expérience. Jusqu'à présent, nous ne connaissions en France des anciensflu- thiers italiens que les célébrités de premier ordre, telles que Amati,