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LA BOUCLE D'OR 369 — « On a toujours dit, répliqua Jean, qu'on ne mettrait pas la Garite en ménage avant qu'elle ait atteint sa majorité. Moi, de mon côté, je ne puis, par suite de la disparition de mon père, contracter aisément mariage avant mes vingt- cinq ans accomplis. Je suis donc en pourparler pour entrer comme contremaître dans une usine que le patron de M. Bo- nin monte au fond du Dauphiné. Le père de M11* Garite, j'y compte bien, me prêtera son appui. Cette combinaison offrirait le double avantage de m'aider à conquérir une position et d'éviter, par un éloignement complet, de don- ner carrière aux langues du faubourg. » Enfin, il conclut, avec l'adorable candeur de son âge, qu'il importait, avant tout, d'interroger la jeune fille : « Si ma proposition lui plaît, tout ce que les autres diront est peu de chose ; si elle refuse, tout ce que je dirai est moins que rien. » Mmc Jauffrey sourit, charmée comme le sont toutes les femmes, lorsqu'elles assistent à la libre manifestation d'un sentiment dont leur sexe est l'objet. Elle promit de s'en- tremettre en faveur de Jean. * * A quelques jours de là , notre amoureux fut prié de passer chez l'abbé Germain. « Vous voulez donc vous marier ? dit le vieillard, en l'invi- tant à s'asseoir. De mon enfance, j'ai souvenir qu'un de mes grands-oncles, évêque d'un des minuscules diocèses que le nouveau régime a supprimés, avait accoutumé de dire qu'il y a deux sortes d'hommes que le bon Dieu aveugle : ceux qui se marient et ceux qui se font prêtres. Si les uns et les