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366 LE DERNIER DES VILLEROY çaises? Le gentilhomme qui avait dans ses veines le sang belliqueux des Lesdiguières et des BoufHers ? Il n'émigra pas, et il fit bien. Il ne songea ni à se jeter dans le Bocage, ni à soulever les paysans du Dauphiné ou du Forez, et il fit encore mieux. Mais, où il manqua de fidélité et de vail- lance, c'est en, ne Songeant pas même à protéger le roi de son épée, pas plus à Versailles qu'aux Tuileries. Tremblant, se ralliant aux idées nouvelles pour sauver sa tète, il chercha d'abord à se faire oublier. II essaya de se cacher, tantôt dans son hôtel de la rue de Varennes, tantôt à Villeroy. Se voyant de plus en plus compromis par son nom, sa naissance et sa fortune, il afficha des opi- nions républicaines, se proclama et se. crut sans-culotte, et finit par s'entourer de gens du peuple qu'il paya et qui pro- mirent de le sauver. Rien n'y fit et ce fut en vain qu'il se berça de l'espoir d'échapper à l'échafaud. Un jour, il fut arraché de sa demeure, enlevé à ses domes- tiques dont sa bonté l'avait fait adorer et qui le suivirent. On le conduisit dans ces terribles prisons de la Convention qui ne rendaient pas leur proie, et il ne revint pas. Inoffensif par lui-même, nul dans les destinées de la nation, qui aurait pu l'épargner sans danger pour elle, il périt, le 28 avril 1794, à côté du dernier des intendants de la Généralité de Lyon, l'infortuné Jean Terray. Avec eux moururent, sous le même couperet, le comte de La Tour du Pin, ci-devant noble; le comte d'Estaing, amiral, que ses victoires navales et son récent dévouement à la Révolution ne purent sauver ; un conseiller d'État, trois avocats, un chirurgien, un obscur marchand de tabac, une religieuse. Ce fut le bilan de la journée. Noblesse, peuple,