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380 LA BOUCLE D'OR permet de suspecter, puisqu'elle s'expose à de graves péna- lités — Olympe Fanta cessera toute démarche ; l'orphe- line restera, pour l'administration hospitalière, l'enfant inscrit sous le numéro 3,417, sans père et mère connus, avec les époux Bonin comme tuteurs officieux; Jean pourra, en quelques mois, se procurer l'acte de décès de son père et procéder au mariage, avec le simple consentement de ses grands-parents ; il épousera la Garite, et tout sera dit. Hélas! ce serait le bonheur pour tous, et le bonheur est si rarement atteint ! Malgré les efforts de M. et Mme Bonin pour cacher, à leur fille d'abord, puis au public, ce qui s'était passé, il était inévitable qu'il en perçât tôt ou tard quelque chose. Déjà fort ébranlée par les premières révélations de ses parents adoptifs dont elle s'était longtemps crue la fille, la pauvre enfant eut une crise violente, lorsque, un dimanche, cachée par une tonnelle où elle s'était assise pour lire, elle entendit des voisins raconter qu'elle était la sœur de Jean, que les Bonin avaient acheté le silence de sa véritable mère à prix d'argent et que, dès lors, c'était une monstruosité de donner suite au mariage projeté. Au cri qu'elle poussa, on accourut. Elle fut relevée, raidie et froide, et ne reprit la parole que pour divaguer, huit jours durant, dans un accès continu de fièvre. La raison revint, la santé aussi. Mais, avec les rumeurs malveillantes qui avaient cours, d'autant plus à redouter qu'il était à peu près impossible de leur opposer un démenti concluant, il devenait obligé de laisser au silence le temps de se faire et d'ajourner le mariage. Jean voulait s'expatrier et emmener, pour quelques an- nées, sa jeune femme en terre étrangère. La Garite répon- dait qu'il était plus simple, puisqu'on les disait frère et