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                          ET SA FAMILLE                    209'

   Colonia fit son panégyrique, Massillon son éloge, mais
les regrets profonds du peuple furent encore plus éloquents.
Camille avait administré pendant quarante-cinq ans notre
ville et nos provinces; il y avait été juste et y était aimé.
Saint-Simon, le cruel justicier, l'écrivain à la plume de fiel,
si habile à dénigrer ses contemporains et à vouer au ridi-
cule la plupart de ceux dont il a immortalisé le souvenir,
Saint-Simon n'est pas trop sévère pour le défunt et, en le
mordant, il ne lui reproche rien de grave ni de sérieux. La
probité est intacte, la vertu est sauve, l'habileté adminis-
trative inattaquée. Il ne le raille que de sa passion pour la
chasse, de sa petite taille et de sa tournure ultrà-modeste
qui le faisait ressembler mieux à un curé de la Dombes
qu'à un prince de l'Église. Au fond, et le peintre admis, ce
portrait peut passer pour un éloge et c'est ainsi que nous
le prenons.
   Mais voici, d'ailleurs, le texte lui-même dans ce style
endiablé dent, seul, Paul-Louis Courier a su, plus tard,
retrouver le secret.

   «... C'était un petit prestolet, à mine de curé de village,
aussi haut que son frère était souple; qu'il menait à la
baguette et son neveu au bâton; qui avait plus d'esprit et
de sens encore que son frère; fut peu archevêque (est-ce
bien vrai?) et moins commandant que roi de ces pro-
vinces, qu'il ne quittait presque jamais. »

   En résumé, et d'après Saint-Simon, il était simple de sa
personne, fier de son rang, avait de l'esprit, du sens com-
mun, chose toujours rare, et résida au milieu de ses admi-
nistrés malgré les plus pernicieux exemples. Et voilà tout
ce que dit la plume la plus envenimée du royaume ? D'ail-
        N° 3, — Septembre 1S87.           ï           \A