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           LE PAYSAN
                             POÉSIE




   Ainsi que le grain mûr à ton sein confié,
 Pour que surgisse un jour l'épi glorifié,
Ainsi Ton déposait dans tes flancs, ô Cybèle,
Marâtre qui l'avais, de ta dure mamelle,
A renfort de sueurs, nourri quatre-vingts ans,
 Un voisin, paysan plus que les paysans.
Quatre-vingts ans sonnés il avait sans relâche,
Ahanê sous le poids de sa peineuse tâche ;
Sans relâche émondant ses glauques oliviers,
 Piochant le sol durci, dépouillant les mûriers
 Pour sustenter le ver précieux et débile,
Qui tire de sa bouche une trame, subtile
 Comme le fil auquel sont suspendus nos jours ;
Sous lesflammesfauchant son blé maigre, et doigts gourds,
Sous le mistral glacé, l'hiver, cueillant l'olive;
'Puis, grain par grain, le soir, à la lampe tardive,
La triant sur les grands linceuls, dont le trésor
Sous la meule de grès va couler en flots d'or.
   S ' i . - Juillet 1887.                      r