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J82 DE LA DIGNITÉ DE L'ART. sur la terre. Mieux que dans leurs livres elles ont déposé là 'toute leur manière de croire, de vivre et de sentir. Et n'est- il pas vrai que nous mesurons toujours le degré de civilisa- tion d'un peuple à la perfection de ses œuvres d'art et qui les plus haut placés dans notre estime ce sont encore ceux qui ont laissé les œuvres les plus parfaites. Que trouvons-nous chez tous les peuples anciens ou modernes? l'art naître, grandir et atteindre son apogée au service de deux grandes idées: la glorification de Dieu et les honneurs rendus aux héros de la patrie ; en est-il de plus civilisateurs ! Nous dirons plus tard a quelle phase de la vie des nations s'introduit dans l'art le dogme de l'imitation comme but suprême ; hélas ! ce n'est pas à la plus glorieuse ! Mais poursuivons. Quelle qu'elle soit statue, édifice ou tableau, l'œuvre d'art est conçue dans le sanctuaire de la pensée. L'imagination de l'artiste qui doit l'enfanter, illuminée par un rayon d'enthou- siasme, en a la perception avant que cette œuvre n'existe pour tous les yeux, Mais pour que ce rêve prenne un corps, une forme intelligible pour tous, que cette pensée devienne pa- role, comprend-on toute l'activité intellectuelle que devra dé- penser son auteur ? En effet, pas une de ses facultés morales qui ne soit mise en vibration tour à tour ou en même temps, dans ce long travail d'enfantement. C'est dans son âme ébranlée par le saint enthousiasme des poètes lyriques qu'il puisera le caractère puissant et divin de son œuvre, devant laquelle fléchiront les genoux et les âmes se rempliront de respect et de vénération, que cette œuvre s'appelle le Jupiter Olympien de Phidias, une cathé- drale ou une basilique chrétienne, le Moïse de Michel-Ange ou la Transfiguration de Raphaël ! C'est avec son cœur qu'il produira ces œuvres charmantes qui mettent de douces larmes dans les yeux, scènes tou- chantes, têtes délicieuses transfigurées par les sentiments