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               LA PESTE A SAINT-GENEST-MALIFAUX                    341

Juifs à la mode de son temps et de sa montagne, au lieu de
leur conserver le type légendaire, dont il ne s'est guère
écarté. Son œuvre, médiocre au point de vue dramatique,
serait pour nous un document précieux. Mais trop soucieux
de la vraisemblance, il n'a que rarement laissé échapper
quelques-uns de ces traits, qui trahissent le milieu où l'on
vit, les mœurs et les passions qui s'agitent autour de l'écri-
vain. Ses personnages sont trop de convention, sa poésie
trop impersonnelle; l'action n'y gagne pas beaucoup ; l'in-
térêt historique y perd (10).
   En une circonstance, cependant, Jacquemin s'abandonne
à peindre ce qu'il a sous les yeux et le laboureur qu'il met
en scène est certainement l'écho fidèle des plaintes du
paysan forézien, pressuré contre son gré par le gabeleur,
l'usurier et même le lévite, victime des mauvaises saisons,
des voleurs et des procès. La dîme, la taille, les corvées,
gens d'église et gens du roi le ruinent, le soleil avare ne
mûrit pas les moissons et le loup emporte ses moutons.
Comme tableau de mœurs, ce monologue mérite d'être
conservé, nous le citons à ce titre.



   (10) Dans un volume publié récemment (Théâtre de Sainte-Reine,
Dijon, 1886, Darantière), où M. Durandeau a recueilli les drames-
mystères, inspirés par la vierge bourguignonne, l'excellent écrivain
constate, comme nous, avec quelle lenteur la révolution littéraire,
partie de Paris, gagna la province.
   Dans l'œuvre d'un certain chanoine Millotet, contemporain à peu
près du poète de Saint-Genest, on relève les mêmes défauts de versifi-
cation et les mêmes bizarreries d'accouplements de mots.
   On pourrait encore comparer au Triomphe des Bergers le Mystère de
l'enfance du Sauveur, joué à Saint-Haon-le-Châtel, dans le xvne siècle.
— Tout l'avantage reste à notre Jacquemin (Cf. Revue du Lyonnais,
année 1867).