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LES 294 ALIÉNÉS DEVANT L'OPINION L'isolement est pour les aliénés une condition indispen- sable qui permet d'instituer et de pratiquer une médica- tion; c'est aussi un agent thérapeutique dont la valeur intrinsèque est reconnue et hors de discussion. On s'est habitué à envisager les asiles comme des lieux de détention, en les dépouillant de leur caractère hospita- lier : on les considère uniquement au point de. vue de la protection de la société et pas assez à celui de leur intérêt spécial. Il ne faut pas oublier, en effet, que les fous sont des malades et surtout des malades qui ne peuvent se pas- ser de l'aide d'autrui pour diriger leurs actes. Rarement ils se rendent compte de leur état, mais ce fait se rencontre quelquefois. Les conceptions qui constituent leur délire, les illusions et les hallucinations qui trompent leurs sens sont pour eux des réalités auxquelles ils ont une foi entière et que Ton est mal venu de discuter. Les efforts mis en œuvre pour les dissuader deviennent pour eux des manœuvres destinées à les tromper; à plus forte raison, quand on veut s'opposer à l'exécution des projets enfan- tés par leur délire. Les précautions dont on est forcé de les entourer dans un double but de protection pour eux-mêmes et pour ceux qu'ils approchent, deviennent des actes de persécution qui leur inspirent des sentiments de colère et de vengeance. Dans ces conditions, il n'est pas facile de faire accepter une médication à des individus persuadés de l'intégrité de leur santé et souvent de la malveillance de ceux qui la leur présentent. Non seulement, ils n'en reconnaissent pas l'op- portunité et bien moins encore la nécessité, mais ils eu considèrent l'administration comme un attentat à leur per- sonne. Bien peu, parmi eux, se croient malades, ou s'ils ont quelque soupçon de l'état anormal de leur santé, leur