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              UNE SOIRÉE DANS L'AUTRE MONDE                439

 tant pour le drapeau de notre patrie en Algérie et en Tuni-
 sie, me dit avoir assisté aux cérémonies étonnantes des
 Aïssaouas et m'assura qu'il ne pouvait les expliquer que par
 une intervention surnaturelle. Peut-être serez-vous avec
 moi de cet avis.
    Au soir fixé, nous nous rendîmes chez Si-Hamou. On
 connaît ces charmantes habitations arabes, si pittoresques
 avec leur cour ouverte, entourée d'une galerie à colonnes
 légères et pavée de faïences de couleur. Comme dans
 l'atrium antique, une fontaine fait jaillir au centre les
 perles d'un petit jet d'eau. Pour la circonstance, les murs
 étaient tendus de draperies aux couleurs vives, une tente
 rayée formait un toit au-dessus de la cour. De riches tapis
 de nuances chaudes couvraient le sol. Tout ruisselait de
 lumière; entre chaque colonne, des faisceaux de bougies;
 autour de la fontaine, un cercle de feux faisaient étinceler
les dorures des tentures et des lourdes portières.
    Si-Hamou avait invité les principaux Arabes de Constan-
tine; et, peu à peu, cette cour ainsi transformée en salon,
se remplit d'Arabes aux burnous d'une éclatante blancheur,
 qui l'un après l'autre, après nous avoir été présentés par
notre hôte, s'assirent en cercle. Immobiles et silencieux,
ils attendaient, drapés dans leurs vêtements blancs, qui ne
laissaient voir que leurs visages aux traits énergiques, leurs
longues barbes et leurs yeux noirs, en pleine lumière, sous
le reflet ardent des draperies rouges. Le cheik des Aïs-
saouas entra suivi d'une trentaine de fidèles, et s'assit à nos
côtés. Toujours pâle, émacié, il laissait errer lentement son
regard triste et froid. L'iman à figure bestiale s'occupait
seul de l'organisation des cérémonies.
    Les khouans, sur son ordre, se rangent en demi-cercle,
 se tenant serrés par les bras et commencent à hurler en se