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102 SULLY-PRUDHOMME Il conquit, sur la brute, au dehors le repos ; Mais dans son propre corps un fléau plus tenace A depuis pénétré sans bruyante menace Pour lui livrer combat cette fois en champ clos. La maladie, obscure et traîtresse ennemie, Etend et fait sévir sa puissance ennemie Par l'âpre et long travail de son venin vivant. Mais tu le prends au piège où ton flambeau l'accule; Ton souple et fort génie, ô bienfaiteur savant, De cette hydre invisible est le nouvel Hercule (8). Après ces nobles vers est-il nécessaire de vouloir encore. monter plus haut et de donner pour titre à toute une partie de ce nouveau livre ce majora canamus que Virgile inscri- vait jadis sur cette quatrième églogue où le Moyen-Age charmé croyait entendre la voix d'un prophète ? La philo- sophie du Prisme ne diffère pas, en effet, de celle des pre- mières œuvres. C'est le même culte des lois de la nature, la même contemplation résolue et sans espoir des règles immuables devant lesquelles tout fléchit : lois éternelles en ce sens qu'on n'en constate point l'origine et que rien n'en fait prévoir le déclin; lois immuables puisque le calcul vérifie leur exactitude et qu'on n'y découvre point de varia- tion; mais faut-il ajouter lois intelligentes? Tout y semble prévu et il y manque l'esprit qui prévoit. Elles donnent l'illusion de la Providence et semblent la démontrer. Vaine apparence! C'est un simple enchaînement de faits dont on cherche inutilement à saisir le premier anneau. La suite est vraiment imposante et l'ordre admirable; de Bonald appe- lait l'homme une intelligence servie par des organes ; la (8) Prélude, sonnet à Pasteur.