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194            LES ALIÉNÉS DEVANT L'OPINION

sion naturelle et urgente d'approfondir cette question si
mal connue et cependant si digne de l'être.
   Les aliénés sont tout simplement des malades : comme
tous les malades, ils ont droit aux soins réclamés par leur
état. De même, les asiles ne sont que des hôpitaux ou des
hospices comme ceux où l'on traite les autres maladies, et
dont les fous ont plus encore raison de bénéficier, parce
que leur affection est de celles qui généralement ne peu-
vent guère être soignées efficacement à domicile.
   On s'est accoutumé à regarder l'internement des aliénés
dans des hôpitaux spéciaux comme une véritable incarcé-
ration portant atteinte au principe de la liberté individuelle.
Devant l'opinion publique, l'asile est une prison au seuil
de laquelle on doit laisser toute espérance. Cette ma-
nière de voir est très répandue aujourd'hui, surtout parmi
les personnes qui n'ont pas de ces malades dans leur
entourage ou qui ne les voient que de loin. Elle repose sur
des apparences tout à fait spécieuses et capables de justifier
l'émotion que fait naître une séquestration. Si l'expérience
et la raison n'étaient pas d'accord pour en démontrer la
fausseté, le nombre annuel des guêrisons obtenues donne-
rait un éclatant démenti à ce préjugé. La liberté individuelle
est une des plus nobles et des plus essentielles préro-
gatives de l'homme : c'est un droit dont l'exercice ne
peut être suspendu sans qu'un motif d'un ordre supérieur
l'exige impérieusement. Le violer, c'est commettre un
acte très grave et alarmer les consciences.
   L'isolement, ou si l'on veut, la séquestration des alié-
nés paraît, au premier abord, une véritable atteinte à la
liberté; mais en réfléchissant, les choses ne se prononcent
pas d'une manière aussi claire en faveur de cette apprécia-
tion, et l'observation révèle une situation bien différente