Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                      LE PÈRE DE LA CHA1ZE.                          489

d'un orgueil sans bornes, à prétendre que l'homme, sans le
secours du ciel, pouvait atteindre, par ses propres forces, à la
perfection, à la sainteté, saint Augustin combattit le Titan, et
l'Eglise le foudroya.
   L'erreur de Pelage était diamétralement opposée à celle de
Jansénius. Pelage anéantissait la grâce au profit de la liberté
morale. Jansénius immolait le libre arbitre à la grâce. En exa-
gérant outre mesure la puissance de l'homme, les pélagiens
détruisaient l'intervention de Dieu ; en déniant à l'homme le
pouvoir d'agir librement, les jansénistes absorbaient l'homme en
Dieu et en faisaient tour à tour un esclave de la grâce ou de
la concupiscence.
   Pour^tre dans le vrai, il faut se tenir à égale distance de ces
deux systèmes. L'Eglise les a condamnés l'un et l'autre en ce
qu'ils ont d'extrême et d'exclusif. Elle nous ordonne de croire à
la fois et au libre arbitre" et à la grâce. Mais comment conci-
lier l'action simultanée de la liberté humaine avec la volonté
divine ? C'est un mystère qu'il n'est point donné à l'homme de
pénétrer et devant lequel doit s'incliner notre faible raison.
   La croyance de l'Eglise est que l'homme, depuis sa chute, a
besoin d'une grâce céleste qui le soutienne, le fortifie et dirige
vers le bien ses facultés amoindries et viciées par le péché ori-
ginel. Cette grâce suffisante, tous les hommes l'ont reçue en
partage à leur naissance, les pécheurs comme les justes, les
Chrétiens comme les Infidèles, « puisque c'est pour le genre
humain que le Christ est mort (1). « — D'un autre côté, « la
volonté de l'homme, quoique affaiblie et rendue infirme, n'a pas
été anéantie par la faute primitive, ni réduite à une incapacité
absolue (2) ; » elle agit toujours, mais il lui faut un soutien
et une direction. « En un mot, Dieu veut que nos actes aient
lieu et aient lieu librement, parce que sa volonté toute puis-


   (t) Voir les consciencieuses études de M. l'abbé Maynard, sur Pascal,
t. Ier, passim.
   (2) Pascal, sa vie et ses écrits , ete., par l'abbé Maynard , tom. I ,
p, 271.