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364 DES PEINTURES QUI DECORENT, ETC. se passaient quelquefois ainsi, dans les bonnes maisons, puisque nous trouvons cette image dans les Heures d'Anne de France, fille de Louis XI. Les livres de prières avaient toujours en tête un calendrier avec une vignette à chaque mois; celle qui nous occupe est placée au mois de février. Quelques années plus tard Marguerite d'Autriche guidée, dit-on, par un sentiment exagéré de pudeur, se laissait mourir plutôt que de montrer son pied déchiré par un fragment de verre introduit dans sa pantoufle : ou les habi- tudes avaient bien changé en peu de temps, ou Paris était déjà plus avancé que Malines. Après avoir observé les travaux des miniaturistes, il serait bon de se livrer à une enquête sur ces artistes eux-mêmes. A quelle classe appartenaient-ils ? Quels étaient leurs modèles ou leurs moyens d'études? Étaient-ils honorablement rétri- bués? Comment ces imagiers, faibles dessinateurs, mais observateurs sensibles et intelligents, ont-ils su exprimer les mouvements de l'âme avec tant de vérité, tandis qu'ils dessinaient si pauvrement les proportions du corps? et comment a-t-il pu se faire que ces artistes, ignorants comme ils l'étaient de la forme humaine, connussent si parfaitement l'anatomie des végétaux ? car a une époque où l'étude de l'histoire naturelle n'existait pas encore, la botanique et la zoologie ingénues, suivant l'expression de M. Ferdinand Denis, étaient déjà peintes sur les marges des livres. L'étude attentive des peintures qui couvrent les anciens manuscrits soulève plusieurs questions de ce genre dont la solution présenterait quelque intérêt, mais elles sont étran- gères au sujet qui nous occupe. Je me borne a répéter, en terminant, que, pour tout ce qui tient a la vie domestique, les peintures des manuscrits peuvent nous fournir plus de ren- seignements que l'architecture et la peinture monumentale. Louis PERRIN.