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                       LE PÈRE DE LA CHA1ZE.                              69
révocation, elle abolissait en réalité toute espèce de contrainte,
et « elle fonda une tolérance de fait qui dura jusqu'à la fin du
règne. (1) »
   Cette déclaration, entre autres dispositions, garantissait la resti-
tution des biens de tous les émigrés qui consentiraient à rentrer
en France sous la seule condition de promettre de se faire ins-
truire, et comme la Déclaration ne fixait aucun délai, il était
évident que le Roi comptait laisser aux réformés une assez grande
liberté de conscience.
   Enfin, S. M. défendait formellement de contraindre les nou-
veaux convertis à recevoir les sacrements (2).
   Le Roi s'était déjà dessaisi, en faveur des parents des calvi-
nistes émigrés, des biens qu'ils avaient délaissés et dont le fisc
s'était emparé (3).
   Telles furent les conséquences de l'Edit de Révocation qui ont
donné lieu à des jugements si divers.
   La royauté avait agi dans la plénitude de son droit, elle avait eu
pour elle la tradition politique, l'assentiment unanime de l'Eglise,
celui de tous les corps de l'Etat et de la nation entière-, elle
avait obéi à la tendance générale du siècle ; elle s'était appuyée
enfin sur le droit commun qui régissait alors l'Europe.
   Si notre industrie fut un moment ébranlée, si l'humanité eut
à gémir des abus de pouvoir du Marquis de Louvois, la France,
du moins dut s'applaudir, au jour du danger, de ne plus nourrir
dans son sein les fanatiques qui s'armaient contre elle avec ses
ennemis, pour morceler son territoire et détruire sa nationalité.
   Enfin, si l'unité religieuse n'était pas pleinement reconquise,
les catholiques pouvaient espérer qu'un jour viendrait où il
n'y aurait plus de dissidents.

   (1> Histoire de Mad. de Maintenait, par le duc de Noailles, t. II, p. 604.
   (2) Plusieurs intendants outrepassant leurs pouvoirs et les ordres de la
cour avaient, dans plusieurs occasions, forcé les calvinistes à s'approcher
des sacrements. Louis XIV mit fin à ces sacrilèges.
   (3) « En 1689, le fisc se trouva possesseur des héritages de 100 mille
citoyens, ils furent rendus aux héritiers des fugitifs. «
                             Mémoire de M, de Breteuil à Louis XIV.