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()(i LE PÈRE DE LA CHAIZE. Cette révolte impie et sacrilège amena de cruelles représailles. Nous croyons cependant que les écrivains ennemis de Louis XIV ont fort exagéré le mal. Il ne faut jamais se lasser de combattre pour défendre la vérité historique lorsque cette vérité a une certaine importance. Nous pensons donc qu'il est de notre de- voir de relever une erreur récemment commise par un critique. Voici ce que dit M. de Carné, d'après le témoignage fort^con- lestable, pour ne pas dire suspect, du comte de Boulainvilliers : « Lorsque la coalition européenne eut préparé à Louis XIV les terribles épreuves où se consumèrent ses dernières années, le protestantisme vint donner dans les Cevennes aux ennemis de la France le concours d'une Vendée dans laquelle, de l'aveu d'un homme qui porta dans la poursuite des ennemis de ses croyances l'impassible cruauté qu'entretient l'esprit de parti, « cent mille hommes périrent, dont dix mille par le feu, la corde ou la roue. » L'homme auquel fait allusion, M. de Carné, c'est Lamoignon de Basville, intendant du Languedoc, un des esprits les plus remarquables du XVII e siècle, par l'étendue comme par la sa- gesse de ses vues administratives. La fermeté de Basville n'ex- cluait ni la modération ni la justice, et si les protestants le crai- gnaient, ils ne pouvaient s'empêcher de l'estimer ,• il était si peu violent qu'il ne fut point d'avis de la Révocation. Voilà le jugement que portent de Lamoignon de Basville ses contempo- rains. Si M. de Carné eût ouvert simplement la Biographie géné- rale de Michaud il eût évité de se montrer si sévère envers un homme fort honorable, et fort honoré, même par ses ennemis. Mais là n'est pas l'erreur principale de M. de Carné. Son erreur c'est de lui avoir attribué l'opinion sur laquelle il s'appuie lui- même pour avancer que cent mille hommes, etc. ont péri dans cette guerre. Basville, dans ses Mémoires, ne dit pas un mot des paroles que lui prête M. de Carné, et ses Mémoires sont authen- tiques (1), tandis que l'ouvrage de Boulainvilliers, auquel M. de (1) Voir les Mémoires pour servir à l'histoire du Languedoc, par feu M. de Basville, intendant de celte province, in-12, Amsterdam, Pierre Eoyer, (734