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  colline roide et rocailleuse arrête brusquement votre regard ;
  dans l'une de ces anfractuosités, vous apercevez une chaumière
 délabrée et sans ombrage, c'est la maison du possédé. Au-des-
  sous de vos pieds , à une grande profondeur, vous avez la som-
  bre vallée de Gourtal et le bruissement monotone d'un torrent.
  C'est ici le lieu des apparitions , des bruits surnaturels , des
 chasses-malignes, sinistres ébats des esprits de la nuit, bruyantes
 mascarades des sorciers et des lutins , où se confondent en un
 charivari épouvantable le miaulement des chats , le roulement
 descarosses, le claquement des fouets, les ricanernens des far-
 fadets. Malheur au voyageur téméraire qui, entendant derrière
 lui ce brouhaha de l'enfer, se hasarderait à tourner la tête! il se
 sentirait alors emporté en de yiolens tourbillons, enveloppé et
 étouffé dans une Irame de toile immense , jusqu'à ce que son
 bonheur lui eût inspiré ou rappelé quelqu'une de ces bonnes
 formules captieuses qui mettent le diable à quia. Il est remar-
 quable que, dans les contes populaires , le diable demeure tou-
jours le nigaud. Il a bien payé la peine de son orgueil évangélique,
 le pauvre diable, le moyen-âge lui a infligé sans pitié sa mor-
 dante ironie ; il l'a revêtu de formes grotesques, il l'a bafoué,
 il l'a écrasé de ridicule , un enfant peut lui rire au nez. Ouvrez
 le Grand Albert, à la page fatale, le diable va vous apparaître
soudain hideux et difforme: « Que me veux-tu? vous dira-t-il
 de sa bouche grimaçante. » Ne vous en laissez pas imposer,
répondez tout simplement : « Je veux que tu épuises la mer avec
un panier. » Et le diable sera capot, il s'en retournera confus
le grand Jean de Nivelle. Nos grand'mères nous ont souvent ré-
pété , pour le besoin , ces bienheureuses formules qui lient la
puissance de Lucifer; car notre enfance, à nous, Forésiens, a
été bercée de contes diaboliques et de bien d'autres encore.
Temps heureux et vraiment poétiques de l'existence, où sans
se douter de ce que peut être la poésie, on la respire avec la
vie, on en jouit comme de l'air, comme du soleil. A Crozet,
elle était répandue partout, dans les bois , dans les vents, dans
les chants du soir^ dans les veillées d'hiver, et surtout dans les
âmes bonnes et croyantes des habitons. Mes impressions les plus
profondes, mes airs les plus aimés et les plus intimes, ceux