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83 même on entendit frapper sous les pieds d'Antoinette Un nombre de coups égal à celui qu'on avait demandé, ce qui ne permit plus de douter qu'un esprit fût venu habiter le couvent des dames de Saint-Pierre. Le bruit qui s'en répandit dans la ville fut grand. Beaucoup de personnes accoururent dans l'espoir d'être témoin de quelque apparition, mais aucune ne put satis- faire sa curiosité, car on ne permettait point l'entrée du mo- nastère. Comme cet esprit ne faisait aucun mal, les religieuses com- mençaient à ne plus en avoir grande frayeur. Elles se seraient même, sans doute, familiarisées tout-à -fait avec lui, s'il n'eut été indispensable de savoir positivement à qui l'on avait affaire. Ou interrogea donc Antoinette de Groslée sur ce qu'elle pensait que ce pouvait être. Celle-ci répondit : qu'ayant rêvé souvent de sœur Alix de Tisieux, elle ne pouvait penser autre chose sinon que c'était l'ame de cette sœur qui se manifestait ainsi à elle. Alors on conjura l'esprit de dissiper les doutes qu'on avait à cet égard, et l'esprit parla, et il dit qu'il était réellement celui de soeur Alix de Tisieux. Aussitôt l'abbesse fit assembler son con- seil, lequel délibéra que le corps de cette sœur serait exhumé du lieu où il reposait pour être transporté dans une des cha- pelles de l'abbaye. Cette translation fut faite avec une grande pompe, et l'esprit témoigna la joie qu'il en éprouvait en heur- tant plus fort qu'à l'ordinaire sous les pieds de la jeune et jolie possédée. La cérémonie terminée, on pensa, d'une part, qu'il était urgent de délivrer, s'il était possible , l'ame de cette pauvre sœur des peines du purgatoire, et de l'autre de s'assurer que le diable, car le diable est bien rusé , n'avait pas employé ce sub- terfuge pour lutiner ces bonnes religieuses. Or, ce fut le vendredi 22 février 1526, que Barthélemi Por- talenqui, évêque suffragant de Lyon, sous François de Piohan , archevêque, accompagné de l'official et de plusieurs prêtres, se transporta à l'abbaye de Saint-Pierre pour découvrir s'il s'agis- sait réellement de l'ame de la défunte, ou de quelque mauvais esprit. Lorsqu'on eut tout préparé pour les exorcismes , conju- rations et adjurations ; que les assistans eurent juré sous peine d'excommnnicalion de ne rien révéler de ce qu'ils verraient, ou