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                          LA BOUCLE D'OR                 373

il, musique n'eut pour lui douceur égale au murmure de
cette mécanique, mise en mouvement par un petit pied
qu'il voit saillir du bas de la jupe d'indienne et s'y cacher
soudain, pareil à une souris noire effarouchée, et dont
les guindés, de temps à autre rendues immobiles par la
rupture d'un fil, reprennent vie sous les doigts de fée de
l'ouvrière.
   Le soir, sous la conduite de Mme Bonin, ils vont rendre
visite à l'oncle Germain, longeant c'es interminables rues à
jardins, dont les murs s'égayent, par endroits, de quelques
frondaisons plus hautes. L'air tiède est chargé du parfum de
maturité qu'exhale la nature au mois d'août. Aux lueurs de
la lune qui met un sourire dans le ciel, on aperçoit, de
loin en loin, d'autres couples errants dont les mains se
détendent et les propos se taisent, à l'approche d'un pas
étranger.
   Solitude et silence, effluves mystérieux et clartés dis-
crètes, tout est fait pour ouvrir l'esprit au rêve, le cœur à
l'espérance !

                                *



   Ces entrevues se renouvelèrent trois ou quatre fois dans
Tannée. Il n'y a point lieu de s'étonner que M. et Mme Bonirî
aient accepté ce projet de mariage à longue échéance. Chez
les paysans et chez les ouvriers, dans les milieux où les
cœurs parlent plus librement et où les préjugés pèsent
moins sur les rapports, il n'est pas rare qu'avant les épou-
sailles, des jeunes gens « se fréquentent » pendant plusieurs
années. La tendance qu'ont les familles à raccourcir de
plus en plus le stage des fiancés, témoigne simplement de
      K° 5. — Novembre 1887.                        24