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SUR LA MUSIQUE 145 dans l'école moderne de l'Italie, où tous viennent débiter une éternelle cavatine, sortie du même moule avec son point d'orgue obligé. Quelquefois l'imitation s'attache à un mot isolé qu'elle saisit au passage et cherche à traduire sans s'inquiéter du sens général. C'est l'apogée du faux et de l'absurde, en voici un exemple tiré de la Dame Blanche, et pourtant Boïel- dieu était un compositeur d'infiniment de goût et d'esprit. Dans l'air de Georges, sur les mots : sitôt que la trompette sonne, la trompette entre effectivement dans l'orchestre, l'air est plein de verve, d'élégance et d'excellente facture, ce calembourg musical vient tout gâter. En cherchant bien, on pourrait grossir la liste de ces bévues, mais chez les compositeurs de talent ce sont des accidents, des distrac- tions, souvent un sacrifice fait à la mode ou à la faiblesse des auditeurs et non des fautes commises de parti pris. Une espèce d'imitation encore plus contraire au bon sens, est celle d'un instrument par un autre. C'est un mau- vais compliment à faire à un violoniste que de lui dire qu'il imite quelque chose, fût-ce même la voix, comme de dire à un chanteur qu'il imite le rossignol. Garât, à qui un béo- tien de son temps adressait ce compliment usé, lui répon- dit : Fi donc! le rossignol chante faux. Cela est vrai, relative- ment à la tonalité de notre musique fort différente de celle des oiseaux. Quelquefois, pourtant, les oiseaux émettent des notes agréables pouvant être reproduites par les instru- ments avec plus ou moins d'à -propos ou de niaiserie. C'est ainsi que le coucou et la caille sont entrés dans la symphonie pastorale. Aux concerts des sœurs Milanollo, on a pu entendre une imitation du chant du coq, faite par Maria, dans le Carna- N° 2. — Août 1887. 10